– Mers chers & tendres amis. Nous sommes là pour l’arrivée du jour tant espéré ; enfin des morts pour inaugurer ce fameux n°573. L’une de mes grandes promesses lors de la campagne & je l’ai tenue & je vous comprends.
Hourra & bravo.
– Merci. En ces temps infernaux, il fallait que je réagisse & je l’ai fait. Mais avant toute chose, y’a bien sûr le remerciement envers les victimes des divers attentats survenus ces derniers temps, sans qui -il faut l’avouer- ; ce cimetière ne serait qu’un terrain vague, où nos gosses jouaient parmi les tessons de bouteilles & les seringues & bombonnes de gaz ; maintenant, ils pourront le faire ici, en toute sécurité. Mais d’abord, en hommage, je vais vous citer les noms de ceux & de celles qui sont tombés.
Le président sort une pile de feuille & tousse ;
– Les familles ; Dayly, Red, Fitu, Oussé, Brique, Rasoir, Devin & j’en passe… & des meilleurs !
La foule applaudit cet hommage & -surtout- sa longueur & jette des roses sur la scène, puis déverse des larmes sur le sol -émotion générale.
Soudain ; un hooligan balance une rose épineuse, hurlant ; « Tout ça n’est rien…» PAN !; balle en pleine tête. On applaudit l’agent de sécurité responsable du tir & on lui verse une rente à vie. Le président sort de sous son pupitre ; personne n’est blessé par la fleur.
& on continue la cérémonie ; après l’injection du cadavre-hooligan dans la fosse-commune. Un compteur-géant indique le score ; I mort.
– Ah… les aléas de la vie… dit le président. Mais oublions cet incident -mineur- & faisons la fête ; youhou ! fait le président débouchant une bouteille & serpentins de toutes les couleurs.
Une masse de gens -non invités- campent devant le portail du cimetière.
On prévient le président ; l’effectif de la sécurité ne va -surement- pas suffire.
– Si ces gens veulent -tellement- rentrer ; qu’ils le fassent les pieds devant. Il faut bien trouver un moyen de remplir ce cimetière.
Le chef de la sécurité retourne à son poste ; après le garde-à-vous réglementaire.
– Vous voyez ce type, M.ZO ? demande le président.
– Oui monsieur le président, & bien ?
– & bien ; c’est un agent-double à la solde d’activistes.
– Votre chef de la sécurité ?! Mais pourquoi ne pas le neutraliser ?
– Vous avez -encore- à apprendre cher M.ZO. Nous avons pénétré son globule-cérébral ; ce chef -ce cher chef- nous livre -de façon inconsciente- des infos capitales sur les activistes ; comment croyez-vous que l’agent ait pu tirer aussi vite sur ce hooligan ? Un jour ou l’autre, nous allons tellement brouiller son globule qu’il va croire à sa couverture ; & il deviendra -sans doute- l’un de nos meilleurs agents.
– C’est aussi simple ?
– & oui.
– Un petit-four Crème-à-Toir-&-Cie ? -monsieur le président.
– Un Mort-Back d’activiste ! hurle le président. Il veut m’empoisonner avec un petit-four à la succulente apparence ; à moi la garde !
PAN PAN PAN PAN PAN ; plus d’activiste.
On balance son corps dans la fosse-commune ; 2 morts.
Journaliste ; Cher monsieur le président, vous permettez que je vous appelle ainsi ?
Président ; Oui mon pti’.
Journaliste ; Cher monsieur le président, vous venez d’être la cible de deux attentats dans un laps de temps que nous pouvons qualifier de court. Votre réaction ?
Président ; Ne jamais reculer devant un Corps-Back d’activiste.
Journaliste ; Une question -cher monsieur le président-, ne pensez-vous pas que tous ces groupuscules puissent -un jour- se regrouper en un seul & unique mouvement ?
Président ; Nan. Nous faisons tout pour que cela ne se produise jamais. Je tiens à rassurer La Nation-&-Cie ; Le Gouvernement-&-Cie travaille corps-&-âme pour la sécurité de son peuple.
Journaliste ; Cher monsieur le président ; je veux vous remercier pour le temps -chose si précieuse pour une entité telle que vous- que vous m’avez -si gracieusement- accordé afin de répondre à mes questions. Je vous aime -cher monsieur le président- ; tendrement & comme un enfant qui aime son père ; cher monsieur le président.
Président ; Continuez donc mon pti’ ; vous êtes sur la bonne voie.
Des PAN & des ARGH provenant de devant le cimetière.
– Nom de nom ! qu’on aille dire à ces foutus agents de mettre des sourdines à leurs armes. & puis ; qu’ils visent -direct- dans le mille ; tous ces hurlements/gémissements me rappellent La Grande Révolution de 72 ; tant de morts pour rien…
– J’y vais monsieur le président.
– Un mouchoir monsieur le président ? moi aussi ; tout cela m’émeut, dit une actrice blonde pulpeuse à la robe translucide.
– Madame, dites-moi « Joyeux anniversaire monsieur le président » dans la langue des U.S.A-&-Cie & ma tristesse disparaitra.
– Hum hum…
– Argousse ! hurle le président. Ma bonne-femme qui me surveille…
– Nan, ce n’est que moi & je me permets de vous rappeler que votre femme est morte monsieur le président.
– Quoi M.ZO ? en plus de la peur que vous m’avez foutue, vous me cassez mon coup & en plus vous me faites rappeler un douloureux souvenir ? Voulez-vous que je vous vire ? -pied dans le cul & bye bye.
– O nan, monsieur le président ; sans vous où irais-je ? vous êtes un guide pour moi, un père même…
– Ta gueule, on me l’a déjà faite celle-là. Bon ; qu’est-ce qui y’a ?
– Les premiers bulldozers sont là.
Au loin ; l’actrice blonde pulpeuse à la robe translucide discute avec le premier ministre.
– O le Mort-Back ; il me pique mon amoureuse ! je vais le zigouiller sur place, dit le président en sortant un pistolet de son caleçon.
– Nan monsieur le président, dit M.ZO. Souvenez-vous de l’affaire Jacky-Ken.
C’était là une référence -très claire- à l’assassinat de Ken (premier ministre à l’époque des faits) par le président Jacky XV ; là aussi pour une affaire de fesse ; cela fit scandaleusement effet dans l’hémicycle ; un oppositioniste lâcha un essaim de Mamba-polychromes du Sud de l’Etat-&-Cie durant la réunion de crise, score -là- ; I22 morts.
L’oppositioniste se déclara non-coupable ; il finit pendu. C’était un lundi matin d’été ; où il pleuvait.
– Vous avez bien raison -mon cher- M.ZO, dit le président ; remettant l’arme à sa place initiale. Pas pour une histoire de bonne-femme -encore une qui aurait tout chamboulé dans ce monde- ; elle ne sait pas ce qu’elle manque. Où sont les bulldozers ? -je vous prie.
– Ils n’attendent que votre permission, monsieur le président.
– Mes amis ! les bulldozers ! hurla le président dans un porte-voix.
CLAP CLAP CLAP CLAP CLAP.
Puis ; bruits de moteurs d’engins de chantier.
Les bulldozers font leur apparition ; poussant des montagnes de cadavres dans les fosses. Un artiste-peintre immortalise le moment, un écrivain décrit, un musicien compose. Tandis qu’un autiste dit « génie » -en un clin d’œil- compte le nombre de corps entrant dans les fosses dites indistinctes ; 3I2… 3I3… 3I4… 3I4… 3I4…
– Mais qu’est-ce qu’il lui prend ? Arrêtez tout ! hurle le président. Y’a un pépin avec le mongol de service ; M.ZO, allez-voir !
M.ZO va voir & revient ; un truc dans les mains.
– Mais qu’est-ce que ce machin ? M.ZO ; veuillez lâcher ça -tout de suite- ; c’est sans doute un nid à microbes.
– C’est des fœtus-siamois ; l’autre andouille doit sans nul doute ignorer si il faut qu’il compte deux morts ou un mort ou si il faut considérer des fœtus comme une chose morte ou vivante. Vous le savez ; vous ?
Réflexions…
– Ou dois-je transmettre l’affaire au Ministère-de-l’Ethique-&-Cie ?
– Nan surtout pas ! ces types sont -totalement- incompétents. Laissez-moi encore réfléchir.
Réflexions…
– Voilà ; coupons tout en deux ; I/2.
– I/2 ?
– Oui ; siamois coupé en 2 ; I, puis I coupé en 2 ; I/2 !
– Quelle logique, monsieur le président. Permettez-moi de vous dire que vous faites honneur à vos fonctions.
– Il le faut -mon cher- M.ZO. Que l’autre mongol & ainsi que tous les autres fassent avec.
L’autiste se remet à compter ; 3I4,5… 3I5,5… 3I6,5…

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