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La contrée de Soufflegivre est l’une des cinq contrées de l’empire Elricen. C’est la région la plus au sud, et forme une passerelle entre l’empire et le reste du monde. La région de Soufflegivre, elle, est réputée pour avoir connu plus de période de guerre que les autres régions. Ils ont connus tout d’abord la guerre du nord qui débuta vers l’an 316, la première guerre officielle des nordiques depuis le grand réveil qui avait opposé les hommes et les elfes pour la possession des terres enneigés de ce monde. Lorsque cette guerre se termina, la ville de Soufflegivre a été le berceau des révoltes des elfes sauvages qui avaient été réduis en esclavage, après la victoire des humains. La rébellion a détruit tout un quartier de la ville en l’an 475

La contrée de Soufflegivre a aussi connu l’un des plus terrible fléau de cet univers : le portail démoniaque. Un portail démoniaque est une fissure magique qui créée un passage entre le monde éveillé et le plan démoniaque. De ce plan, sort une multitude de créature sadiques et violentes qui ne souhaitent que semer la destruction et corrompre de leur présence les terres où se trouvent le portail (les portails et les démons supérieurs corrompent lentement le sol et les être vivant à proximités d’eux, entraînant une modification physique et la folie, sauf certaines exception tel les elfes qui sont immunisés contre la corruption mentale). Lorsque le portail démoniaque est détruit, une sorte de compte à rebours d’une centaine d’année s’enclenche avant qu’une nouvelle fissure apparaisse, plus ou moins puissante et grande que la précédente. On suppose qu’il y a quelqu’un ou quelque chose créant ses fissures pour ainsi prévoir des tentatives d’invasions.

Celle qui apparu en l’an 781, dans le sud de la région de Soufflegivre, a été détruite en 786 par les forces unies de l’empire Elricen. Même si ce portail est pour l’instant le moins puissant à avoir été recensé, celui-ci a fait beaucoup de victimes, notamment le seigneur Calander Soufflegivre, laissant sa place à son jeune fils, Théodore Soufflegivre pour s’occuper de la région.

Actuellement, la région de Lunerouge est en confrontation avec la dynastie de Soufflegivre, après l’avoir accusé de ne pas avoir tenu la promesse de lui donner une partie de ses terres en échange d’une aide militaire pour s’occuper du portail démoniaque. Théodore comptait lui offrir ses terres après avoir achevé toutes les reconstructions nécessaires, mais le seigneur actuel de Lunerouge ne voulait pas attendre longtemps et a annexé les terres par la force (il est considéré par presque tout l’empire comme un vieux fou), et la guerre entre les deux régions fait actuellement rage.

———————————————————-Chapitre 4 :

Voilà déjà dix bonnes minutes qu’Eleonore attendait dans cette église en ruine. Elle n’avait pas le temps d’attendre. Ne rien faire l’angoissait : il y devrait toujours un moyen de se rendre utile. Pourquoi devait-elle attendre aussi longtemps ? Le temps était précieux aux yeux de la jeune fille, qui ne faisait que le voir s’écouler.

Son attente prit fin avec l’entrée d’un vieil homme dans la chapelle. Un prêtre qui lui était familier.

-Eleonore ? Je n’arrive pas à croire que tu sois-là.

Horas…Son père de substitution qu’Elle avait perdu de vue depuis si longtemps. Depuis dix ans, approximativement. Après la mort de son véritable père, tué au combat, Horas devint son tuteur, et la personne la plus proche de la jeune femme et de son frêre.    

-Bonjour Horas

Eleonore restait assise, l’observant. Le pauvre bougre semblait bien plus vieux que la dernière fois qu’elle l’avait vu. Horas n’était pas un exemple de beauté : il avait les joues creuses d’un affamé ou d’un malade (alors qu’il avait toujours été bien portant), aucun cheveux sur la tête, des yeux fatigués, un nez crochu qui ne l’aidait pas à sortir de son physique naturel de créature sournoise…mais il compensait largement ces quelques défauts d’apparence par son intelligence, sa sagesse, son sens de la réflexion. C’était la personne qu’il fallait voir si l’on avait un problème, ou lorsque l’on lui demandait son avis ou un conseil. Il avait toujours été là pour elle.

-Alons, fillette. Viens dans mes bras.

Celui-ci écartait ses bras, maintenant grands ouverts, et aussi larges que son sourire. Eleonore,elle, ne bougeait pas. Elle se montrait toujours distante avec tout le monde. Les émotions, les attachements n’apportaient que de mauvaises choses. Rien de pire que de perdre quelqu’un que l’on aime, elle avait appris ça à la mort de son père. Elle se sentait déjà mal de porter trop d’affection à son frère, qui risquait sa vie fréquemment pour sauver les terres de leur enfance. Tout cela finirait mal si elle ne se forgeait pas un cœur de fer. Et même si elle aimait son ancien tuteur comme un autre père, elle se contenta juste de se lever et de lancer d’une voix douce :

-Je suis heureuse de vous revoir Horas.

-Et moi donc. Comment va ton frère ?

Le vieil homme baissa les bras, et s’approcha de la jeune femme. Il s’assit à coté d’elle, toujours souriant.

-Il est encore vivant, ça me suffit amplement, répondit-t-elle avec froideur.

-Je vois que tu continue de te satisfaire d’un rien. Tu n’as jamais fait ta difficile.

Eleonore repris la parole, cette fois-çi d’une voix plus insistante et irritée

-Je ne suis pas venue pour discuter du bon vieux temps. Quelque chose d’autre m’amène ici.

-Par les Dieux, Eleonore. Après autant d’années, il m’est interdit de prendre des nouvelles de vous deux ?

-Je suis vraiment désolée, mais je veux savoir si mon voyage ici a été utile ou non.

Horas effaça son sourire. Il connaissait évidemment sa personnalité froide et sérieuse. Eleonore savait que se comporter comme ça ne  le décevait ni ne l’insultait. Elle était toujours ainsi. Son attachement naturel envers ceux qu’elle aimait se cachait sous un masque d’insensibilité

-Je pense savoir ce qui t’amène, ma chère, répondit Horas. Tu veux de l’aide pour cette guerre ridicule ?

Elle hocha la tête, évitant le regard du vieil homme et regardant un peu autour d’elle :

-ça ressemble donc à ça, la base des veilleurs de Bassebranche?

-Ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Je suis heureux de voir que tu as l’impression qu’il n’y a que ça : cela me prouve que nous somment bien cachés après tout.

-Bien cachés ?

Elle tourna la tête vers Horas.

-Se cacher dans une battisse abandonnée au milieu de la forêt ? Ça a été déjà fait des centaines de fois par je ne sais quel nombre de criminels ou d’organisations. C’est une cachette presque évidente.

-Et pourtant, depuis quatre-cent-cinquante ans, personne ne nous a trouvé encore, répliqua-t-il. Cela veux bien dire que personne n’a encore cherché ici.

Il eu un long silence. Horas reprit la parole :

-Donc. Si je résume bien : La région de Soufflegivre est attaquée par Lunerouge, ils commencent à devenir réellement dangereux, et tu cherche à engager notre guilde d’espions pour chercher des informations sur eux, afin que la balance pèse en votre faveur ?

On ne pouvait pas dire que c’était de la divination de sa part, ou un coup de chance inouïe. Son vieux tuteur avait raison, et il était évident qu’Elle n’aurait pas voyagé autant pour quoique ce soit d’autre. De toutes façons, pourquoi tourner autour du pot une éternité ? Eleonore était ravie de pouvoir en venir au fait :

-L’aide des veilleurs pourrait nous aider à reprendre le dessus. Si mon frère et nos amis savaient où les Lunerouges frapperont et quand, je pense que cette guerre ridicule pourrait se terminer vite.

-tu oublie un détail, Eleonore. Nous tentons de rester le plus neutres possible. Nous évitons les histoires de politique. Et ce n’est pas parce que l’on se connait depuis longtemps que je t’accorderais cette faveur.

Eleonore se leva vivement. Elle lui répondit d’un ton outré.

-Comment ? J’ai fait tout ce chemin pour ça ? Des souvenirs du passé et un refus presque immédiat, sans même avoir à argumenter pour te convaincre ?

-Tu peux toujours essayer de me convaincre, mais cela ne te mèneras pas loin

-Mais tu ne peux pas nous faire ça. Je ne suis pas là pour rien. On a besoin de votre aide, sinon je crains le pire.

-Ne pense pas que je vais impliquer une vieille organisation neutre dans des histoires politiques juste pour tes suppliques. Je ne peux tout simplement pas faire ça.

-Mais je ne cherche pas à vous convaincre en vous suppliant, ou en ayant pour raison nos vieilles relations pour en faire une exception.

-Alors pourquoi es-tu encore ici, si tu pense que tu ne peux rien faire pour arranger la situation ? Te connaissant, tu serais déjà partie loin.

-Car je pense que c’est possible. Je pense que je peux vous trouver une raison de nous aider. Il doit bien y avoir quelque chose, je ne sais pas…de l’argent ? Beaucoup d’argent ? Une nouvelle base bien plus luxueuse que cette église ? Des titres ? N’importe quel service…De toutes manières, n’attends pas de moi que je franchisse le seuil de la porte de ce lieu avant d’en ressortir vainqueur.

-Bon…je vais voir ce que je peux faire. Mais ne t’attends pas à  obtenir quelque chose de moi ou de mes confrères, une fois que je leur en parlerais. Ton ambition pourrait te décevoir dans une bataille presque perdue d’avance.

-Foutaises. Je vais y arriver.

Le ton d’Eleonore était insistant. Sa volonté était inébranlable. Horas poussa un soupir et se leva :

-Le soleil ne va pas tarder à se coucher. Je doute que tu atteigne un refuge, et tu as fais un long voyage jusqu’ici. Sois notre hôte pour la nuit.  

La jeune femme hocha la tête en signe d’accord. Voyager seule dans les bois n’était vraiment pas une bonne idée. De toute façon, elle comptait sur le fait qu’elle puisse dormir sur place. Elle se doutait qu’Horas ne l’aurait pas laissée toute seule la nuit en pleine forêt. Elle savait se défendre, mais ce n’était pas une raison pour faire des actes idiots, inutiles et insensés. Elle avait entendu de nombreuses histoires sur des héros de comtes moralisateurs ou sur des individus quelconques de la vie de tous les jours, tenter de commettre des actes de bravoure…avant d’en payer le prix fort. Elle se rappelait avoir entendu un homme parler de ses beaux jours, lorsqu’il disait qu’il était un aventurier autrefois, avant de se prendre une flèche dans le genou, faute de trop d’assurance et d’une mauvaise protection. Il en paya le prix, dut abandonner sa vie rêvée avant de s’engager dans la garde de Soufflegivre. À force d’entendre des histoires comme ça, Eleonore avait appris la valeur de la sûreté et de la prudence. Elle savait qu’il fallait un petit instant inattention…une petite erreur…et ce pouvait être la fin.

Eleonore espérait juste que le logis de fortune serait confortable. Ce n’est pas parce qu’elle savait s’adapter à tout qu’elle aimait dormir dormir dans de mauvaises conditions. Comme beaucoup de personnes, elle aimait le luxe, les objets de bonne qualité. Elle préférait de loin un grand lit à baldaquin aux couettes chaudes et aux oreillers en plumes d’oies qu’une vulgaire meule de foin. Qui n’aime pas ce qui est douillet ?

-Marcero va te conduire à ta chambre.

Eleonore se leva et accompagna Horas jusqu’à la sortie de la petite salle. Ils se retrouvèrent dans le couloir principal. Horas se tourna vers elle et prit délicatement la tête de la jeune femme entre ses mains.

-Je suis tellement heureux de te revoir, soupira-t-il.

Eleonore se força à lui sourire. Après tout, le pauvre bougre méritait bien de voir que ses enfants adoptifs avaient toujours de l’affection pour lui. Marcero sortit du fond du couloir. Lorsqu’il arriva à quelque pas des deux individus, Horas recula tranquillement et repris sa route. Marcero le regarda un instant, avant de se tourner vers Eleonore :

-Suivez-moi, mademoiselle. Je vais vous conduire à l’une des chambres. Nous allons vous en offrir une petite. Il appartenait autrefois au prêtre supérieur des lieux et je pense que vous allez vous sentir mieux qu’avec tous les prêtres réunis au dortoir.

-Très aimable, merci, répondit-t-elle.

-Elle se trouve dans un autre bâtiment. Suivez-moi.

Lorsqu’il atteignit la vieille porte moisie, Marcero la poussa. Un  »Cling! » se fit entendre et le loqueteau en fer tomba sur le sol. La porte, commença à tomber vers l’avant, avant de s’effondrer lamentablement et silencieusement (le son amortit par la neige) sur le sol. Un instant passa sans aucun geste, avant que le colosse ne soupire et traverse le seuil de la batîsse.

-Cette porte va me rendre fou.

Il attendit qu’Eleonore sorte, et prit le haut de la porte et la tira vers lui. À sa hauteur, il commença à la pousser sur l’entrée. Marcero la repositionna négligemment, et posa le loqueteau sur le bord d’un muret à coté de lui, en poussant un léger râle.

-Je m’en occuperais plus tard. Je donnerais n’importe quoi pour vivre et dormir dans un lieu décent, continua-t-il en soupirant.

-Apparemment, vous n’avez pas trouvé l’attitude sereine et sage d’un vrai prêtre, lui fit noter Eleonore, avec une pointe d’amusement dans le ton.

Il se tourna vers la jeune femme.

-Et vous allez me dire que je n’ai pas le physique d’un espion ? Que je n’arrive pas à me faire discret avec mes muscles et ma taille.

Elle haussa les épaules en répondant :

-Je pense que cela n’aide pas, tout simplement

-Et pourtant, je suis un espion. L’un des meilleurs, même. Les apparences sont trompeuses. Si on ne s’attend pas à ce que je sois un prêtre, on ne s’attend pas de moi à ce que je sois un espion non plus.

-Avouez que le simple fait d’être rayé de la liste des prêtres dans un lieu où vivent des prêtres est bien intriguant.  

-Jusqu’à maintenant, ça n’a sauté aux yeux de personne. Rares sont ceux qui passent ici, mais ça reste amusant à constater…quoi qu’il en soit, vous devez être fatiguée non ?

-Pas vraiment

-Laissez-moi au moins vous montrer le chemin. Après, libre à vous de vous promener un peu, mais la nuit va tomber assez rapidement

On voyait déjà le soleil disparaître légèrement au dessus de la cime des arbres. Marcero continua son chemin. Ils firent une cinquantaine de mètres, avant de tomber sur les dortoirs, encore vide. Eleonore partit du principe qu’ils étaient tous en train de prier. Tout de même…tant de mise en scène pour ne pas éveiller les soupçons…c’était impressionant. Comment arrivaient-t-ils juste à organiser toute la guilde avec la vie de prêtre ? Elle traversa la salle, et atterrit devant une porte qu’elle ouvrit, faisant place à sa chambre de fortune : un lit avec de la paille surmonté d’un drap, avec une chaise, une table, ainsi que le symbole du soleil de la lune, symbole d’Arilia…Elle devra se contenter de ça.

-Vous avez besoin d’autre chose ? Demanda Marcero

-Non. Merci beaucoup.

Elle marcha vers le lit et se posa doucement. Elle enleva son domino, et la plia pour en faire un carré soigneux. Elle le posa sur le bord du lit, en guise d’oreiller. Rien à faire d’autre. Juste attendre le verdict du jury. Elle n’avait pas d’envie particulière d’aller se promener finalement.

-Si vous avez besoin de quoi que ce soit, demanda Marcero, je serais à côté.

Il sortit de la pièce, laissant Eleonore seule avec ses pensées. Celle-ci resta un instant à regarder le vide, songeuse. Cette initiative serverait-elle réellement à quelque chose? Il y a des chances, de grandes chances pour que tout ça n’ai servi à rien. Elle avait peur d’avoir épuisé un temps précieux pour une cause perdue. Avant de s’endormir, elle fit les cents pas dans sa chambre. Inquiète de ne rien faire, elle réfléchissait. Elle réfléchissait à tout ce qui se passait, les choses qui avaient était faites, qui se faisaient et qui restait à faire. Eleonore ne pouvait pas laisser juste toute cette histoire de côté. C’était trop important. Son esprit chauffait et chauffait, tandis que se construisait lentement un organigramme complexe sur la situation. Parfois, lorsqu’elle faisait ça, elle s’oubliait, oubliait qu’elle existait…d’une manière, c’était assez reposant. La plupart des individus vident leur tête un instant pour pouvoir mieux réfléchir.

Eleonore, pris rapidement de fatigue, décida qu’il était peut-être temps d’aller se coucher. Elle devait avoir les idées claires et être reposée. Elle s’allongea sur son nouveau lit, en posant son regard sur le plafond. La lune était belle ce soir : le plafond était troué. Laissant échapper un soupir, elle se tourna vers le coté. Elle espérait juste qu’il ne pleuve pas cette nuit.

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