Sa proie se déplaçait souplement sur les toits de la ville enneigée. Elle la suivait des yeux, la regardant bondir devant la lune bleue et disparaitre à nouveau dans les ténèbres en quelques secondes. L’assassin tentait de lui échapper. Il l’avait sentie dès la première seconde. Mais elle s’en fichait.
À nouveau, le reflet d’une des lames du tueur apparut fugitivement à l’angle d’une rue. Alyzane s’y dirigea avec nonchalance. Il était déjà reparti. Mais elle s’en fichait.
Elle suivait les traces de pas dans la neige, les gouttes de sang ressortant sur le duvet blanc du sol. Il n’était pas là. Mais elle s’en fichait.
Parfois, elle entendait son souffle, un juron. Il fatiguait. Pourtant, la distance se creusait toujours. Mais elle s’en fichait.
Le jeu était la meilleure partie. La traque. Pour une fois, l’assassin était le gibier et il n’aimait pas ça. Il avait décidé de la tuer pour se sortir de là. Mais elle s’en fichait.
Elle entendit un bruit derrière elle. Elle se figea. Il l’avait donc contournée. Elle sentit une main glacée lui tirer les cheveux, la poussant à pencher la tête en arrière. La lame glacée de la dague.
**~*~**
Dès que le cou fut dégagé, il fit courir sa lame dessus. Avec un soupir de soulagement, il s’attendit à voir le sang chaud couvrir la neige et la femme s’écrouler.
Au lieu de cela, le corps de celle-ci se figea, devint glacial en un instant et… s’effondra en milliers de flocons emmenés par le vent.
Il jura en comprenant qu’elle s’était jouée de lui. Et il hurla quand son esprit lui révéla la vérité. Elle l’avait tué. Elle jouait seulement avec les derniers sursauts de son esprit.
Déjà, la neige bougeait, l’encerclant, formant une sphère blanche autour de lui. La neige était vivante et elle l’étouffait. Le contact glacial ne dura qu’un instant. La mort était rapide avec elle. On chuchotait qu’elle était efficace et douce. Il pouvait l’affirmer. Mais il n’avait personne à qui le dire. Car la ville n’existait pas vraiment. Et il n’existait plus non plus.
**~*~**
Alyzane sortit de son sommeil et s’assit dans le lit. Le corps de son amant d’un soir était à côté d’elle, figé dans la mort et par le froid. Elle sourit. Elle était Alyzane, la créatrice de rêve. Et elle lui avait fait visiter son rêve à elle, la ville, Alyzane. Sa ville. Avec ses neiges. Et elle lui avait offert une mort douce. Car elle était comme cela, la reine des neiges : douce, mais glaciale.

90