La joie et la reconnaissance des villageois étaient grandes. Neil se sentait comme un héros malgré son humiliation sur le champ de bataille. Il eut une petite pensée pour Zadion qui voulait être un sauveur pour son clan. Mais ce dernier avait choisit une voie bien différente.
Son attention fut ensuite portée sur Thesion : le vrai héros. A l’accoutumée, Thesion était à l’écart. Mais cette fois, Neil avait sondé en lui. Il découvrait un garçon mystérieux mais aussi brave. Quelque part il lui ressemblait.
Les villageois continuaient à chanter et parler dans leur langue locale, sans se soucier si les visiteurs comprenaient.
Les magiciens ne savaient répondre autrement que par des sourires. Lorsqu’ils faisaient comprendre qu’ils n’avaient rien compris, les villageois se mettaient à rire de plus belle. Quant à Beobras, il avait une aisance pour communiquer malgré la barrière de la langue. Il se débrouillait avec une poignée de mots appris pendant ces voyages. Les embrassades n’arrêtaient pas de pleuvoir sur les jeunes braves et le doyen les couvrit de guirlandes.
Mais le temps de repartir était venu. Cette mission avait duré plus longtemps que le temps imparti et Beobras dut annoncer son départ car le voyage de retour était long. Ils repartirent à cheval, approvisionnés, parmi les chants de départ et de bon voyage, leur cœur prêt pour la suite de l’aventure.

*

Le soir, nos amis firent halte plus vite que prévu. Cette mission leur avait prit beaucoup de force et ils durent dresser le camp. Neil lança un sort pour allumer le feu. Taha n’étant plus là, les magiciens pouvaient utiliser leur magie pour cela.
La mission étant un succès, Beobras était d’humeur jovial. C’est ce soir-là que Neil décida de mettre à l’aise son nouveau compagnon.
– Maître Thesion, quelle maîtrise ! Ton sort était vraiment parfait. Je me souviens de toi maintenant. Tu as gagné le tournoi des élémentalistes cette année. Le petit Mage aux peintures animées, c’est toi n’est-ce pas ?
– Si je me suis inscrit au tournoi, c’était pour revoir les prodigieux finaliste de l’an dernier. Mais on ne vous a pas revu, toi et Zadion.
– Tu voulais nous voir ?
– Oui, vous êtes nos modèles ! Beobras sourit.
– On parle beaucoup de vous à l’académie, on vous considère comme des génies. Ajouta Thesion qui semblait s’ouvrir à Neil.
– C’est flatteur. Mais crois-moi, Zadion est bien plus doué que moi.
– Où est-il maintenant ?
Sur cette question Neil garda le silence.
– Il a quitté l’école, intervint Emyse le regard vide.
Neil changea de sujet pour ne pas plomber l’atmosphère.
– Emyse ton sortilège pour canaliser notre énergie spirituelle est efficace. J’ai senti tous mes sens en éveil et j’ai eu cette révélation, que le scorpion craignait le soleil. Mais c’était grâce à ton sort Chloromancien.
Mon endurance était bien plus efficace qu’à l’accoutumée. Si tu n’étais pas là, je serai resté à terre comme un couard. Mais au fait, quel sort m’as-tu lancé ?
– Je ne sais si c’est ma magie ou si c’est Dieu lui-même qui vous a sauvé. J’ai prié fort à ce moment là. En tout cas, l’énergie spirituelle circule dans ton corps de la même manière que ton sang. J’ai juste optimisé sa propagation dans les engorgements. C’est un sortilège assez simple.
– Ne sois pas si humble. Cela veut-il dire que tu peux faire l’inverse ? demanda Thesion timidement.
– En théorie oui. Comme il est possible de transférer de l’énergie d’un corps à un autre, c’est ce qui permet aux unités médicales d’opérer les blessés graves.
– Un sortilège qui touche les points vitaux du corps ? Ce sont les Chloromanciens les plus dangereux, ironisa Neil.
– On ne nous enseigne qu’à soigner et non à tuer. Nous en avons fait le serment. Et puis je te rappelle que je fais partie de la guilde des Guérisseurs. Mais il a été décidé que je participe à cette mission. Tôt ou tard je demanderai mon transfert. Il ne me plaît guère de voir toute cette violence.
– Tu as raison, répondit Limeth, les échanges entre guildes sont fréquents. Ils permettent d’équilibrer les équipes qui partent en mission. Sans toi, nous aurions eu beaucoup plus de mal. Vous avez tous très bien agit. Thesion tu as su garder ton sang froid pour une première mission. Neil, tu as su te reprendre et chercher le point faible de la bête. Vous avez l’air de bien vous compléter, je mentionnerai tout cela dans mon rapport.
Neil était convaincu qu’un dernier de classe pouvait devenir un Mage puissant. Thesion était un rêveur qui ne s’exprimait que par sa peinture. Il avait une imagination débordante et son coup de pinceau était égal à celui d’un fin bretteur. Mais dans tous les autres domaines on disait de lui qu’il était un bon à rien. Dans cette école, il avait réussit à exploiter son talent caché de magicien, tout comme l’ancien fermier.
– Quel est donc la nature de ton sortilège ? demanda Neil à Thesion.
– C’est un sortilège élementaliste. La peinture que j’utilise est élémentaire. Les parchemins ne sont qu’un support pour invoquer. Mes incantations leur donnent vie. C’est un sortilège que j’ai développé avec notre professeur d’art, Becelline Belis. Elle a su que je pouvais donner vie spontanément à mes peintures, parfois même sans réciter d‘incantation, de façon naturelle. C’est un don qui m’a été octroyé par Dieu. La plupart des élémentalistes doivent prendre beaucoup de temps pour concevoir leurs familiers. Moi je peux leur donner vie à volonté, à condition d’avoir mes outils magiques. Je ne peux invoquer qu’en peignant. Durant le tournoi de la kermesse, je dessinais sur chaque carte au fur et à mesure des tours. Quant à mes adversaires, ils n’avaient que des cartes préparées à l’avance. J’étais avantagé sur ce terrain car libre d’imaginer leur défaite.
Mais c’était loin du niveau de vos joutes, toi et Zadion.
C’est ainsi que Neil fit connaissance d’un autre jeune prodige et les trois passionnés échangeaient sur leurs incantations, tels des érudits.
Intéressé par le pouvoir d’Emyse, Neil voulût connaître le secret des sorts de guérison.
Alors à chaque pause, Emyse, en bon professeur, essayait de leur enseigner un sortilège Chloromancien pour soigner une plaie. La tâche fut difficile car Neil n’était pas un très bon élève, mais la passion de la magie était égale dans le cœur des jeunes disciples.
– Cela arrange bien mes affaires, vous pourrez vous passez de moi et je pourrai rejoindre ma guilde.
Cela attristait Neil qui voulait garder Emyse près de lui.
Il l’aimait et son amour grandissait à force d’échanges. Emyse était intelligente, débrouillarde et forte. Son passé tragique avait attiré encore plus Neil qui ressentait le besoin de la protéger du mal.
Le voyage de retour fut aussi éprouvant que celui de l’aller et il serait vain de le raconter. De retour à l’académie, nos magiciens prirent des jours de congés mérités. Les différentes missions se succédèrent ainsi et l’équipe de Neil fut sollicitée de plus en plus du fait de son efficacité.

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