C’est terminé, la drogue a finis de faire effet, plus vite chez toi que chez les autres… le carnage… ton esprit est encore embrouillé, tu es fatigué, si fatigué. Tu les as trouvé, tu as trouvé leur location, le groupe d’assaut se préparait, ils ont pris leur morsure… La morsure du loup garous c’est comme ca qu’on l’appelle, elle a un autre nom, un peu plus technique mais l’important ce n’est pas son nom, c’est le résultat. Une drogue surtout utilisée par les forces spéciales et l’armée. Elle coupe les centres émotionnels, transformant n’importe qui en machine de guerre, froide, sans pitié, en monstre. Le deuxième effet est de bloquer momentanément les centres récepteurs de la mémoire immédiate, ainsi il t’est impossible de savoir ce que tu as fait, qui tu as tué, si tu as même participé à ce carnage, des hommes, des femmes, des enfants, tous fauchés par balle, cet oubli est à la fois angoissant et rassurant, c’est peut être toi qui a appuyé sur la gâchette et peut être pas. Vous savez que l’un de vous à un chargeur à blanc… c’est une légende mais tu comprends sa nécessité. Certaines des femmes ont visiblement été violées, était ce avant ou après leur meurtre? Des hommes sont aussi dans des positions douteuses… certains gosses aussi. Sans stimulation émotionnelle, qu’est-ce que le cerveau a pu créer comme palliatif? Mais peut-être qu’il y a aussi une autre explication, quelque chose de rationnel, c’était peut-être comme ça avant que vous n’arriviez. Tu sais déjà que ta psyché va prendre l’explication la moins traumatisante, celle qui va tout expliquer sans te mettre de responsabilité, vous étiez censés enquêter sur des monstres, tu sais déjà que le débriefing mentionnera combien ces gens étaient des dépravés et combien il était utile de les éliminer. Tes doutes tu les avais d’avant… tu as oublié ce que tu as fait le trou sera rempli par des mensonges, en restant dans l’ignorance tu gardes ton innocence. Comme dans les anciens films, certaines légendes, le loup garou qui après une nuit de carnage se réveille un être humain sans aucun souvenir de ce qui s’est passé la veille, sauf peut-être un vague sentiment irréel. Le nom est bien trouvé. Encore à moitié K.O., tu te relèves, le monde tourne autour de toi, si vite, tu dois t’aider du mur à coté de toi pour rester debout. Tu veux vomir tout ce que tu as dans les tripes…voire au-delà. Les autres sont encore sans connaissance, le signal que l’opération est terminée ou que la drogue a quittée l’organisme, ils ne respirent pas tous, tu imagines tout de même que vous avez mené la mission à bien. Tu comprends maintenant pourquoi tes collègues préféraient éviter de t’envoyer dans ce genre d’opération, c’est le sentiment de culpabilité qui le suit, ce trouble bienfait d’effacer la mémoire, peut-être n’as-tu rien fais peut être es-tu responsable de tout. Qui étaient ces gens ? Et si tu t’étais trompé, s’ils s’agissaient juste de quelque pauvre communauté qui se contentait juste d’essayer de survivre d’offrir un meilleur avenir à leurs enfants. Ce n’était pas ce que tu voulais, pas ce que tu voulais, il n’y a là aucun honneur, aucune gloire, tu n’as même pas le sentiment du devoir accomplis, pas d’héroïsme, ils n’étaient même pas armés… Tu hésites, tu n’as pas la force de regarder ton chargeur, la honte et le doute te terrassent. Tu es un assassin, tu veux effacer une mémoire que tu n’as pas, tu veux revenir en arrière tout changer, changer de destin, de lieu, de peau, tu veux être l’un des morts mais ton esprit s’offusque avant que tu aies pu formuler cette pensée, t’affaiblit d’avantage, tu tombes a genoux. Tu essaies encore de te relever, tu veux que tout s’arrête… n’importe quoi pour apaiser cette douleur… Un brusque éclat de lumière, du bruit, plein de bruit c’est insoutenable, quelqu’un te prend par le col, te remet debout, tu ne le reconnais pas, tu utilises tes dernières forces pour le repousser violement. L’effet de la morsure est en partie passé, mais les autres drogues pour augmenter tes capacités physiques et mentales sont encore actives, ton organisme a lui aussi ses propres “trucs”. L’homme se retrouve projeté contre le mur 4 mètres derrière lui, tu le rattrapes pourtant avant qu’il y atterrisse et le placarde. Tu ne peux t’empêcher de grogner, tout est flou autour de toi. Tu ressens le besoin de tuer, pourtant tu ne peux t’y résoudre, tu te contentes de le regarder en grognant, tendu, pendant qu’une guerre se livre dans ton cortex cérébrale, résidus de morsure contre sens morale. Tu n’es pas un tueur, aucun de vous ne l’est, c’est pour ça que la morsure est nécessaire… L’effort fait battre ton cœur plus vite, pompe de l’adrénaline, les restes de morsure sont progressivement éliminés, le syndrome de manque en partie calmé par la même hormone, plus tu t’énerves plus tu regagnes ton calme. Ta vision se précise, tu reconnais le chef de la section spéciale d’Interpol en Uganda. Tu as faillis tuer ton propre chef… tu gargouilles une excuse. Apres le débriefing on t’explique que ton organisme a éliminé la morsure beaucoup plus vite que prévu, étant plus résistant que la normale, tu t’es réveillé avant que les dernières traces ne partent, d’où ta légère désorientation. Tu es bon pour retourner dans le G-12 pour subir d’autres expériences, afin d’améliorer la drogue. C’est encore une fois considéré comme un honneur, ton régime et tes privilèges vont encore augmenter. Grace à toi, des avancées vont être possible afin d’améliorer la “morsure”, grâce à toi, les forces spéciales d’Interpol vont encore plus à même de remplir leur mission. Tous les gens qui vont mourir, ceux qui seront assassinés, c’est à toi qu’ils le devront.

115