Un cri inhumain remonta des entrailles du palais, indiquant que le futur roi avait recommencé ses ignobles expériences. Depuis plusieurs semaines, il essayait inlassablement de créer des armes de guerre vivantes avec des prisonniers comme cobaye. Bien entendu, ces cobayes succombait avant même la fin du processus. Mais le futur roi ne voulait rien entendre et continuait malgré tout d’essayer de faire ce qu’il appelait ses « créations », si bien qu’il serait bientôt à court de prisonniers . Pour combler ce petit contretemps, il avait envoyé plusieurs émissaires sillonner le pays à la recherche de candidats, « candidats » qui bien entendu n’avait pas leur mots à dire. La méthode favorite de ces émissaires était de piéger leurs proies le plus souvent en tuant un de leur proche puis en les accusant du meurtre. Ils les suivait pendant plusieurs jours pour vérifier si la personne correspondait bien aux différents critères, c’est-à-dire être en bonne santé, avoir une carrure solide mais surtout être fort mentalement. Pour vérifier ce dernier critère, ils analysaient la réaction de leur victime quand celle-ci apprenait la mort d’un de ses proche. Si elle tombait en larmes, cela signifiait qu’elle n’aurait pas la force mentale pour résister aux expérimentations. A l’inverse, si la victime restait impassible, ou du moins cachait ses émotions, cela voulait dire qu’elle avait une petite chance de ne pas succomber. Mais cette chance était vraiment très minime, quasiment nulle même. Les hommes qui répondait à ses critères était immédiatement envoyés dans les cachots du palais de la capitale Haldrin.
Bien évidemment, Erika s’était farouchement opposée à ces pratiques et en avait touché deux mots à son frère. Mais comme à son habitude, celui-ci ne l’avait pas écouté. Même si cela la révulsait, elle ne pouvait absolument rien y faire mis à part se taire si elle ne voulait pas subir le même sort que ces malheureux. Son frère n’aurait aucun remords à la faire tuer, elle en était persuadée.
Se bouchant les oreilles avec son oreiller pour ne plus entendre ces ignobles cris, elle ne parvint cependant pas à les oublier. Comment pourrait-elle trouver le sommeil avec de tels hurlements ? N’y tenant plus, elle se leva, réajusta sa robe de chambre et sortit de la pièce. Dans le couloir, elle fut immédiatement abordée par maîtresse Gaïa.
–Ma Dame, que faites-vous ici ? Il n’est pas raisonnable de vous promener ainsi en pleine nuit !
–Je n’arrivais pas à dormir avec tous ces cris.
–Je vous comprends, dit maîtresse Gaïa, mais vous connaissez votre frère, il pourrait très bien vous faire enfermer pour avoir vagabondé ainsi en pleine nuit.
–C’est pour cela que je compte sur votre totale discrétion, puis-je compter sur vous maîtresse Gaïa ?
–Mais bien entendu. Vous me connaissez Ma Dame et vous savez que je ne ferais jamais rien pour vous nuire même si cela devait me valoir une éternité de tourment dans le Royaume-Sans-Nom.
–Merci Gaïa, je ne sais pas ce que je ferais sans vous, déclara la princesse en posant une main sur le bras de sa servante.
–Désirez-vous quelque chose Ma Dame ?
–Un petit en-cas me comblerait de joie. Auriez-vous la gentillesse de me l’apporter dans mon bureau je vous prie ?
–J’y vais de ce pas.
Sur ces mots, Maîtresse Gaïa tourna les talons et partit en direction des cuisines.
Erika se mit alors en route vers son bureau où elle avait encore un énorme tas de paperasses à remplir et très peu de temps pour le faire. Parmi ces dossiers se trouvait des remises de peine qu’elle signait en espérant éviter aux prisonniers le malheur de tomber entre les mains maléfiques de son frère. Mais malgré tous ses efforts, cela ne servait strictement à rien. A chaque fois qu’une remise de peine était signée par Erika, le prince mettait immédiatement son veto et les annulait aussitôt. Mais malgré tous ces échecs, la princesse maintenait ses efforts et continuait à croire qu’un jour une de ces remises de peines finirait par aboutir, bien que cet espoir était vraiment dérisoire.
Erika était le parfait opposé de son frère. Lui était tel une entité directement venu des ténèbres. Mis à part son apparence, il n’avait absolument rien d’humain et ses « créations » n’étaient qu’un exemple parmi tant d’autres de toute la cruauté dont il était capable. Il était persuadé que tout lui appartenait et que le monde entier devait se prosterner devant lui. Tandis qu’Erika elle, semblait être une déesse descendu des cieux. Sa grâce, son élégance, sa légèreté et son visage qui semblait tout droit sorti d’une statue de marbre faisait d’elle sûrement une des plus belle femme de tout le royaume. En adéquation avec cette époustouflante beauté corporelle, elle était aussi doté d’une immense bonté, ce qui lui avait valu l’amour de la plupart des habitants du royaume. Ce qui avait fait la réputation d’Erika – mis sa part sa beauté- est que depuis toute petite elle proclamait que tous les habitants de Mirindin avait le droit de vivre en paix et avec ceux qu’ils avaient choisi. Croyance qui l’avait fait rentrer en conflit avec son frère qui croyait dur comme fer que le monde lui appartenait et qu’il avait tout les droits sur ses habitants. A cause de ce conflit fraternel, le pays était aujourd’hui divisé en deux : ceux qui soutenait le prince d’une part et ceux qui était dévoués à la princesse et à ses idéaux de l’autre. Bien entendu, ces deux parties de la population se détestaient et si cela continuait ainsi, une guerre allait inéluctablement finir par éclater. De plus, le prince avait fait fermer toutes les frontières avec les autres pays, ce qui augmentait encore plus la pression car le pays courait peu à peu à sa perte. Mirindin était certes un puissant royaume, mais son commerce résidait principalement dans l’exportation de céréales et de matières premières. Sans ce commerce vers l’extérieur, l’économie du pays allait tout doucement s’écrouler et si on ne réagissait pas le plus rapidement possible, la famine arriverait très vite et frapperait l’ensemble du pays. Cela ne faisait qu’à peine six mois que les frontières était fermés et le pays était déjà en difficulté, la nourriture se faisait de plus en plus rare et les caisses du palais étaient quasiment à sec. Bientôt, les habitants ne pourrait même plus subvenir à leurs besoins et le pays sombrerait alors dans la misère. Dans six mois, le prince monterait sur le trône et il sera alors impossible de le stopper. Cela ne laissait guère de temps à Erika pour freiner la machine infernale qu’était son frère. Mais elle devait absolument réussir, car si dans six mois il montait sur ce trône, elle serait à tout jamais impuissante face à ses ignominies et le pays entrerait alors dans une ère de chaos et de destruction.
Quand Erika ouvrit les portes de son bureau, elle remarqua avec soulagement que les cris s’étaient enfin arrêtés. Elle pourrait au moins travailler tranquillement et se concentrer sur ses dossiers. Elle se dirigea vers sa fenêtre pour l’ouvrir en grand, s’appuya sur son rebord et profita de la petite brise qui venait chatouiller son visage. Ainsi placé, elle avait une vue imprenable sur les jardins royaux où elle pouvait observer les deux fontaines orné chacune de quatre dauphins de marbre qui avait une signification bien particulière pour elle. A contrecœur, elle se détourna de la fenêtre et alla s’asseoir à son bureau.
A peine s’était-elle assit qu’on frappa timidement à la porte.
–Entrez ! Dit Erika.
Maîtresse Gaïa entra, munit d’un plateau remplit de plats en tout genre. Comme à son habitude, elle n’avait pas fait dans la demi-mesure.
–Voici le plateau que vous aviez demandée Ma Dame.
–Merci Gaïa, posez le ici je vous prie, dit la princesse en désignant la table basse qui se trouvait juste devant la cheminée.
La maîtresse de maison posa le plateau et revint se placer au centre de la pièce où elle resta immobile quelques secondes, l’air très mal à l’aise.
–Oui ? Demanda Erika en relevant la tête.
–Ma dame…, comment vous dire ?… Pensez-vous sincèrement que ces remises de peine aient la moindre chance d’aboutir ?
–Non.
–Alors pourquoi continuer ? Des tas d’autres affaires bien plus importantes attendent votre bon vouloir.
–Tout simplement car si je n’insistais pas, me regarder dans la glace deviendrez tout bonnement impossible. Comment pourrais-je un jour me pardonner de n’avoir rien fait alors que j’avais au moins le pouvoir d’essayer ? Non, il n’en ait pas question, je continuerais à signer ces remises de peine et je sauverai des prisonniers, ou du moins j’essaierais.
Maîtresse Gaïa attendit quelques secondes et rétorqua :
–Sans vouloir vous offenser ni insulter les prisonniers mais justement, s’ils sont enfermés, n’est-ce pas pour une raison bien précise ? Dans votre tas de remise de peine se trouve des violeurs et des assassins. Souhaitez-vous vraiment les voir à nouveaux à l’air libre continuer leurs méfaits ?
–Bien sûr que non ! s’écria la princesse, mais vous oubliez que dans ce tas ce trouve également des innocents, piégés et injustement condamnés pour des crimes qu’ils n’ont pas commis. De toute façon, innocent ou pas, personne ne mérite le sort que leur réserve mon frère. Il est donc de mon devoir de m’y opposer. Si vous avez une solution pour les sauver sans avoir à les libérer, je suis tout ouïe, dites le moi et je la mettrai en application dès maintenant.
–Je vous ai déjà donné la solution : laissez tomber ces prisonniers et sauvez les gens qui peuvent encore l’être ! Vous vous obstinez à sauver des gens qui sont déjà morts et vous oubliez que dehors des gens ont vraiment besoin de votre aide et qui surtout la mérite ! Je vous en prie princesse, revenez à la raison avant qu’il ne soit trop tard ! Plaida Maîtresse Gaïa.
–Maîtresse Gaïa, dit Erika, je comprends votre position, mieux, je la partage. Mais malheureusement j’ai des choix à faire et certains sont très douloureux. Pour l’instant, les prisonniers ont plus besoin d’aide que les gens libres qui peuvent encore se sauver et avoir ne serait-ce qu’une once d’espoir. Les prisonniers eux, n’ont que moi et je ne les abandonnerai pas, cela m’est impossible.
–Je ne vous comprends pas, soupira maîtresse Gaïa.
–Je ne vous demande pas de me comprendre, mais seulement de me faire confiance. Cela est-il possible Gaïa ? Ou alors cela fait-il partie de la longue liste des choses que j’ai perdues ces dernières années ?
–Ma dame, ma confiance en vous est totale. Même si je ne suis pas toujours d’accord avec vous et que certaines de vos décisions me laisse perplexe, je sais que vous faites de votre mieux pour sauver ce pays et ses habitants.
–Oui, mais j’ai parfois l’impression de ne jamais en faire assez, que je pourrais en faire beaucoup plus.
–Ne dites pas ça Ma dame, dit maîtresse Gaïa, vous consacrez votre vie à ce pays, que demander de plus ? Vous en faites déjà bien assez comme ça.
–J’aimerais en être aussi convaincu que vous, mais malheureusement, je ne suis plus sûre de rien en ce moment.
— Si il y a une chose dont vous pouvez être sûr, c’est que je serais toujours là pour vous quoi qu’il arrive.
La princesse sourit — son premier depuis des semaines — et regarda sa servante — non, son amie.
–Merci Gaïa, vos paroles me touchent plus que vous ne pouvez l’imaginer. Cela me fait plaisir d’avoir un peu de sincérité dans un monde qui plonge lentement dans la folie et les ténèbres.
Erika soupira et s’adossa à son siège en se prenant le visage à deux mains.
–Je suis fatiguée, voulez-vous bien m’accompagner jusqu’à ma chambre s’il vous plaît ? Demanda-t-elle.
— Bien sûr Ma Dame.
Les deux femmes se mirent en route. Le palais était redevenu totalement silencieux, on n’entendait plus le moindre bruit. Ce silence donnait au palais un air lugubre et angoissant, sensation qui était accentué par le fait que ce soir, des prisonniers étaient encore mort.
Arrivés au dernier embranchement avant ses appartements, elles furent interpellés par une voix qu’Erika ne connaissait que trop bien, une voix rauque et nonchalante.
–Mais qui voilà donc ! Ma chère sœur et sa domestique vagabondant en plein milieu de la nuit.
–Ce château ne t’appartient pas mon cher frère et, de ce fait, tu n’as aucun pouvoir sur moi. J’ai donc le droit d’arpenter ces couloirs comme bon me semble et à l’heure que je veux.
–Dois-je te rappeler que je suis le futur roi ?
–Dois-je te rappeler que comme tu l’as si bien dit tu n’es que le futur roi, donc tant que tu ne seras pas couronné, tu as autant d’autorité dans ce palais qu’un esclave dans une maison !
— Ton insolence te perdra ! cria le futur roi, peu importe, en tant qu’héritier légitime du trône de notre père, je t’interdis de te promener dans le palais la nuit venue ! Et pour m’assurer que tu ne déroges pas à cette règle, je posterai des gardes devant tes appartements tous les soirs. Pour ta sécurité bien sûr, dit-il avec un rictus au coin des lèvres.
— C’est ce qu’on verra, cracha Erika.
Sur ces mots, elle tourna les talons et entra dans ses quartiers, se jeta sur son lit et pleura de rage. Une fois calmée, elle s’allongea et essaya de s’endormir.
Quand le soleil se leva, la princesse n’avait pas fermé l’œil de la nuit et elle en payait les frais ce matin. Elle se leva difficilement puis se rendit dans sa salle de bain et bénit Maîtresse Gaïa quand elle vit qu’un bain l’attendait. Gaïa avait le don de toujours anticiper ses moindres désirs et besoins, ce qui l’avait toujours émerveillée. Quand elle rentra dans le bain, elle la bénit une seconde fois, l’eau était à la température parfaite. Elle se prélassa dans l’eau jusqu’à que celle-ci soit quasiment froide puis sortit et s’habilla en vitesse. Elle prit ensuite le chemin de son bureau, son ventre criant famine, mais elle se força à l’ignorer. Elle n’avait pas le temps de passer par les cuisines au vu du programme de sa journée qui promettait d’être longue. Elle devrait tout d’abord finir de signer les remises de peine de la veille avant de devoir aller rendre visite à son frère, ce qui ne l’enchantait guère et enfin, elle avait rendez-vous avec un émissaire d’une puissante ville voisine.
Quand elle ouvrit la porte de son bureau, elle bénit une troisième fois maîtresse Gaïa qui lui avait apporté un petit déjeuner, ainsi pourrait-elle se restaurer tout en travaillant.
Dans son tas de remise peine de la journée se trouvait un exhibitionniste qui montrait son « serpent » à toutes les dames qui passait, allant même jusqu’à leur proposer de lui faire un bisou. Ensuite, encore une histoire de vol à la tire sur un étalage du marché de la ville et pleins d’autres petits forfaits du même acabit. Certes ces délits étaient répréhensibles, mais aucun ne méritaient la mort et encore moins de devenir cobayes des expériences d’un prince fou. Au fond d’elle, Erika était réticente à signer les remises de peine des violeurs et des meurtriers, mais entendre les cris que poussaient ces malheureux lorsqu’on les mutilait la poussait à continuer, même si elle relâchait des prédateurs. De toute façon, tous ces efforts étaient vains car aucune de ces remises n’aboutiraient, elle le savait.
Ces dossiers lui prirent toute la matinée, ce qui lui fit prendre du retard sur son programme. Son frère devait déjà l’attendre. Elle se dépêcha donc et partit en courant vers la salle du trône, là où son frère lui avait donné rendez-vous, ce qui l’avait d’ailleurs interpellé. D’habitude, il la recevait dans son bureau. Alors pourquoi changer aujourd’hui ? Elle ne le savait pas mais cela ne présageait rien de bon. Quand elle arriva enfin devant la salle du trône, elle s’arrêta un petit moment, reprit sa respiration et essuya la sueur qui ruisselait sur son front. Elle réajusta sa robe, inspirât un bon coup, ouvrit la grande porte centrale… et manqua une inspiration de surprise devant le spectacle qui s’offrait sous ses yeux.
Son frère était assis sur le trône. Normalement, il n’avait pas le droit de s’y asseoir jusqu’au couronnement. Debout devant lui se tenait une délégation de personne qu’elle devina importante et ils étaient embarqués dans une discussion assez houleuses. Quand il remarqua sa présence, son frère leur fit signe de se taire et daigna enfin se lever.
–Ah ! Voilà enfin ma chère sœur qui comme à son habitude arrive la dernière. Messieurs, veuillez l’excusez et j’espère que ce retard ne remettra pas tout en cause ?
— Bien sûr que non Mon Seigneur, répondit l’homme debout juste à côté du prince.
Erika n’avait jamais vu cette personne de sa vie et ne savait pas de quoi voulait parler son frère qu’elle aurait pu remettre en cause et elle en avait cure.
–Erika, je te présente Tyron, le comte de Jalarin qui est là pour une affaire des plus sérieuses.
–Si tu m’as convoqué juste pour faire des présentations, je t’en remercie mais j’ai d’autres choses à faire, alors tes histoire ne m’intéresse pas.
Erika salua le comte et partit en direction de la porte. Elle était à mi-chemin quand son frère la rappela.
–Tu te doutes bien que je ne t’ai pas fait venir pour rien, cette affaire te concerne Erika.
–Ah bon ? Tu m’en verras ravie mais j’ai des affaires plus importantes à m’occuper que de t’écouter. Et si cela me concerne, eh bien, tu sais où est mon bureau.
Erika tourna une nouvelle fois les talons et reprit la direction de la sortie.
–Ton mariage ne t’intéresse pas ? Demanda le prince.
La princesse fit aussitôt volte-face.
–MON QUOI ? S’étrangla-t-elle.
–Es-tu sourde ou tout simplement stupide ? Je te parle de ton mariage avec Selekrin, le fils du comte de Jalarin.
–As-tu perdu la raison mon frère ? Crois-tu vraiment que je vais me marier avec Selekrin ? Finalement, je crois que c’est toi qui es tout simplement stupide pour croire à des choses comme ça.
–T’ai-je laissé le choix ? Demanda le prince, je ne crois pas. Je lui ai déjà promis ta main et tu sais très bien que notre pays tient toujours ses engagements, donc faire machine arrière est impossible. D’ailleurs, ton futur époux est déjà en route. Tu te marieras dans trois jours que tu le veuille ou non. (Il désigna du doigt les gens présents dans la salle) Les personnes que tu vois là sont ici pour veiller au bon déroulement des préparatifs et à ce que tout se passe comme prévu. Ne les déçoit pas s’il te plaît.
Erika se prit la tête à deux mains. Elle était victime d’une soudaine migraine du fait de ce qu’elle venait d’apprendre.
–Julian, tu me le paieras très cher ! Je fais le serment devant Le Maître que je te tuerais de mes propres mains ! Cria-t-elle, et si ce porc de Selekrin ose ne serait-ce que m’effleurer, il finira dans la même tombe que toi ! Donc si j’étais toi, je réfléchirai à deux fois avant de lui promettre mondes et merveilles !
–Mais c’est tout réfléchi ma chère ! Que tu sois consentante ou pas, tu te marieras comme prévu et contrairement à toi, je ne fais jamais de menace en l’air. A partir de ce jour et ce jusqu’au mariage, tu as interdiction totale de voir ta servante et des gardes te suivront où que tu ailles. Il ne faudrait pas qu’il arrive malheur à la future mariée ! Dit Julian tout en jubilant.
— Tu n’es qu’un tyran ! Explosa Erika, si papa te voyait, cela ferait longtemps que tu aurais été sur l’échafaud !
–Je n’en doute pas, mais comme tu auras pu le constater, il est mort. De ce fait, j’ai le droit de faire ce qui me chante dans mon palais et dans mon royaume !
–Pas avec moi en tout cas !
Après avoir craché sur le sol, Erika sortit de la salle tel une furie et partit en direction de ses appartements.
Comme son frère l’avait annoncé, des soldats étaient postés devant la porte de ses quartiers. Elle passa devant eux sans même leur accorder un regard et s’enferma dans sa chambre en prenant soin de fermer la porte à double tour. Submergée par la colère, elle fit les cents pas et se refit la scène plusieurs fois dans sa tête. Elle n’en croyait pas ses yeux ! Son frère avait osé l’offrir à quelqu’un sans même la consulter ! Cette union la révulsait ! Selekrin était un poivrot ivre du matin au soir et qui ne pensait qu’à se battre. Il avait même été plusieurs fois accusé de viol mais, bien entendu, toutes les plaintes avaient été jeté à la poubelle. Son frère n’aurait pu choisir pire personne au monde ! Il fallait absolument qu’elle empêche cela !
Se calmant un peu, elle tenta de trouver une solution. Elle s’allongea sur son lit et regarda fixement le plafond. Que pouvait-elle faire ? Fuir lui était impossible, les soldats la rattraperait avant même qu’elle n’ait franchi les portes du palais.
Cela faisait plusieurs minutes qu’Erika réfléchissait quand elle entendit du bruit dans le couloir. Elle se leva, approcha de la porte et y colla son oreille, mais à présent le couloir était redevenu silencieux.
Tout d’un coup, elle sursauta quand quelqu’un frappa à la porte.
–Ma Dame, ouvrez moi, vite ! Dit une voix d’homme.
–Qui êtes-vous ?
–Je m’appelle Fyren Mcinter, je suis venu vous sortir de là.
Fyren Mcinter… ce nom lui disait quelque chose ! Elle l’avait déjà vu mais ne se souvenait plus où. Au bout de quelques secondes de réflexion, elle se souvint. Dans les remises de peine qu’elle avait signée ce matin se trouvait un homme ayant tué cinq personnes lors d’une bagarre dans un bar et cette personne s’appelait Fyren Mcinter !
–Je vous connais, dit-elle, j’ai signé votre remise de peine ce matin, c’est vous qui avez tué cinq personnes dans un bar !!
–Ce n’est pas ce que vous croyez. Je vous expliquerai plus tard, mais maintenant ouvrez moi il faut faire vite !
–Pourquoi devrais-je vous faire confiance ? Après tout, vous êtes un assassin !
–Cela serait trop long à vous expliquer. Sachez juste que maîtresse Gaïa nous attend quelques part en dehors de la ville avec des montures.
–D’accord, d’accord je vais sortir, annonça la princesse, mais d’abord éloignez-vous de quelques mètres.
Erika attendit quelques secondes.
–C’est bon, vous pouvez sortir ! dit Fyren.
La princesse déverrouilla la porte et sortit. Fyren était adossé au mur en face de la porte.
–Il faut y aller princesse, la cloche ne tardera pas à sonner.
–Où m’emmenez-vous ?
–Loin d’ici. Allez suivez-moi !
Sur ces mots Fyren partit en courant. Hésitant quelques secondes, Erika finit par lui emboîter le pas.
Elle faillit vomir quand elle remarqua les corps des six soldats étendu sur le sol, la gorge tranché. Comment avait-il put faire ça tout seul ? Pire, aucun des gardes n’avait dégainés son arme, preuve qu’il les avait pris par surprise, mais comment ? Cela était tout bonnement impossible. Comment une seule personne pouvait bien tuer six soldat sans qu’ils n’aient le temps de se défendre ? Elle se promit de lui poser la question une fois dehors. Reprenant ses esprits, elle se remit à courir. Fyren la conduisit à travers tout le palais sans baisser le rythme, si bien qu’Erika fut très vite à bout de souffle, chaque pas lui coûtant un effort considérable. Elle n’avait toujours aucune idée de leur destination, Fyren l’entraînait sans qu’elle sache vraiment si elle pouvait lui faire confiance, après tout, cet homme était un tueur. Ou alors avait-il été piégé ? Dans quel cas ses soupçons ne serait pas fondés. Ils dépassaient une des nombreuses cours intérieures quand une idée lui vint soudain à l’esprit, comment avait-il fait pour s’évader de prison ? De toute l’histoire de Haldrin, la capitale, personne ne s’était jamais échappé des geôles du palais royal. Encore une question qu’elle se devrait de lui poser. Plus ils avançaient et plus elle se posait des questions. Et s’il l’entraînait droit dans un piège ? Ainsi, elle serait en train de courir droit vers sa mort. Elle n’avait pas que des amis dans ce pays, elle avait aussi des détracteurs qui n’aurait aucun scrupules à la tuer. Elle ne savait pas où cela la mènerait, mais repenser à son mariage forcé la poussa à continuer et tant pis si la mort se trouvait au bout du chemin, au moins aura-t-elle évité un mariage qui l’a dégoûtait. Elle accéléra le rythme et rattrapa Fyren qui avait pris plusieurs mètres d’avance.
Ils se trouvaient à présent dans les halls d’entrées et Erika fut surprise de les voir désert, eux d’habitude remplit de monde à cette heure de la journée.
Elle prit le bras de Fyren et le força à se retourner vers elle.
–Fyren, comment se fait-il qu’il n’y ait personne dans ces halls ?
–Ils sont tous dans la salle du trône, le prince à fait convoquer toutes les personnes se trouvant dans le palais.
–Mais pourquoi donc ? demanda Erika, intriguée.
–Sûrement pour leur annoncer votre mariage avec le fils du comte de Jalarin.
–Vous êtes au courant ?
–Oui, maîtresse Gaïa m’as mis au courant, c’est en partie pour cela que l’on doit quitter le palais, pour vous éviter ce mariage.
–Donc, maîtresse Gaïa était au courant, mais comment se fait-il qu’elle en était informé avant moi ?
–C’est à elle de vous le révéler. La seule chose que je puisse vous dire, c’est que maîtresse Gaïa n’a pas voulu vous alerter, elle a donc décidé de ne rien vous dire et de voir la suite des événements. Quand elle a appris que le comte était au palais, elle a réussi à subtiliser une clef à un garde et m’a délivré pour que je puisse vous aider.
–Mais comment a-t-elle réussi à échapper aux gardes ? Et pourquoi vous a-t-elle choisi vous ?
Avant que Fyren ai eu le temps de répondre, l’alarme du palais se mit à sonner.
–Vous saurais tout le moment venu, mais pour l’instant nous devons reprendre notre route !
Fyren la prit par la main et l’entraîna vers la sortie. Droit devant eux se trouvait les portes du palais, ensuite ils n’auraient plus qu’à traverser un pont enjambant des douves et ils seraient enfin libres.
Ils passèrent enfin les portes du palais et entamèrent la traversée du pont, plus que quelques mètres et ce serait bon.
Soudain, un sifflement se fit entendre et un quart de secondes plus tard, Fyren fut comme foudroyé. Il tomba à genoux, un filet de sang s’échappant de sa bouche. Erika se précipita et s’accroupit à côté de lui puis l’examina. Une flèche était planté entre ses omoplates.
–Fuyez ! Parvint-il à dire.
–Non ! Je ne vous abandonnerai pas ! Essayez de vous relever, il le faut !
–Je n’y arriverai pas, c’est fini pour moi. Maîtresse Gaïa se trouve dans la forêt au sud de la ville, vous la trouverez à la lisière, là où la rivière y pénètre.
–Je ne peux pas vous laissez là ! Dit la princesse, paniquée.
Fyren toussa et cracha du sang, il n’en avait plus pour très longtemps, il le savait.
–Je suis déjà mort ! Vous avez encore toute la vie devant vous et puis, tant que êtes en vie, il reste à ce pays encore un espoir, articula difficilement Fyren.
–J’aimerais tellement faire quelque chose pour vous aider.
–Ne vous inquiétez pas, fuyez. Une dernière chose, les prisonniers sont au courant de ce que vous faîtes et ils vous en sont très reconnaissant, sachez-le. Vous avez encore des alliés dans ce palais.
–Ils sont malheureusement de moins en moins nombreux chaque jour.
–Un jour, les habitants de ce pays sauront voir la vérité et ce jour-là, le règne de votre frère prendra fin. Mais pour que cela se produise, il faut que vous restiez en vie ! C’est pour cela qu’il vous faut fuir sans vous retourner !
Un second sifflement se fit entendre. Cette fois-ci, le projectile vint se loger à l’arrière du crâne de Fyren qui tomba face contre terre. Erika se releva et partit en direction de la sortie de la ville. Elle traversa le petit pont et courut aussi vite qu’elle le put à travers la ville. Les passants lui lançait des regards étonnés et elle dut en pousser certains de son passage. Elle franchit les portes et bifurqua vers le sud, là où Fyren lui avait dit que se trouvait maîtresse Gaïa. Elle essaya d’éviter le plus possibles les routes, ce n’était pas le moment que quelqu’un la reconnaissent. Elle coupa donc à travers champs durant environ une heure, faisant régulièrement des pauses pour reprendre son souffle et soupira de soulagement quand elle aperçut enfin la forêt au loin. Elle rejoignit la berge de la rivière Kaarin et la longea tout en continuant de courir jusqu’à la lisière de la forêt. La nuit commençait déjà à tomber quand elle entra dans celle-ci. Elle chercha des yeux quelconque signe de maîtresse Gaïa mais n’en trouvât aucun, à son grand désespoir. Elle s’enfonça de plus en plus profondément dans la forêt, si bien que très vite, il lui fut très difficile de se repérer tant sa vision était réduite par l’obscurité. Au bout d’un moment, alors qu’elle commençait à réellement paniquer, elle aperçut enfin une lueur rougeâtre entre les troncs d’arbres. Elle s’approcha prudemment et constata qu’il s’agissait d’un feu de camp. Sûrement celui de Gaïa. Enfin, c’est ce qu’elle espérait. La princesse continua d’avancer et constata que dans cette sorte de mini camp, se trouvait deux personnes endormis sur des matelas de feuilles. Malheureusement pour elle, à leur carrure, elle devinât qu’il s’agissait de deux hommes et toujours pas de signes de Maîtresse Gaïa. Elle s’approcha doucement d’un des deux hommes, se pencha et mis sa main sur celle du campeur pour ne pas l’effrayer. De là où elle était, elle ne pouvait voir son visage. Elle mit son autre main sur son épaule et le secoua doucement. Celui-ci se réveilla, se redressa lentement pour se mettre en position assisse et regarda Erika dans les yeux…

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