Kyong-Hee dut frapper la crosse de son arme deux fois dans la porte pour réussir à l’ouvrir, la faisant grincer sur ses gonds rouillés par l’humidité salée de l’océan. L’odeur de moisissure rance planait au sol, les parois de tôle étaient fixées par de gros rivets d’acier. Personne ne descendait jusqu’ici, à part les quelques techniciens chargés de la maintenance de la coque, du dessalage de l’eau potable ou de l’alimentation électrique. Et encore, ils ne se concentraient que sur quelques parties bien précises des kilomètres de galeries qui courraient sous la surface de l’océan. D’après les plans que Malékith avait sortis des bases de données, il n’y avait pas de meilleur endroit pour se cacher sur l’île.
En sortant de la cage d’escalier, la Coréenne alluma la lampe sous le canon de son fusil et la pointa vers l’obscurité. Des rats s’enfuirent devant ses pieds. Les sous-sols en étaient pleins, ils s’étaient infiltrés dans les cales des porte-conteneurs. Ceux assez malins pour survivre aux scans et à la désinfection trouvaient refuge dans les galeries, où ils se multipliaient, et remontaient parfois piller les réserves de nourriture. Il aurait fallu les exterminer pour éviter les maladies, mais le conseil ne parvenait pas à s’entendre sur ce sujet.
Kyong-Hee sortit son téléphone et commanda à son oeil de magnifier les contours des objets autour d’elle. Attentive au moindre bruit, elle parcourut rapidement le couloir, ouvrant des écoutilles sur des locaux de stockage vides, ou remplis de matériel de réparation. Le manque de lumière commençait à l’agacer. Après avoir vérifié qu’il n’y avait personne, elle s’accroupit et sortit de son sac un gros amplificateur de signal, dont elle déploya les antennes. Son oreillette crachota avant que la liaison ne se stabilise.
« — Mal’, t’es là ?
— Cette chère Kyong-Hee, toujours un plaisir ! Comment ça va, c’est sympa en bas ? »
Elle parcourut du regard le couloir avec un sourire.
« — Froid, humide, et ça pue. Pourquoi, tu veux venir ?
— Ça ira, je suis bien dans mon fauteuil.
— Tu m’étonnes… Bon, j’y vois rien ici, envoie-moi de la lumière, s’il te plaît.
— Laisse-moi une minute. »
Un bourdonnement s’échappa du plafond, puis des globes s’allumèrent à intervalles réguliers, les uns après les autres, alors que Malékith enclenchait l’éclairage des différentes sections.
« — Voilà. Qu’est-ce que vous feriez sans moi, hein ?
— On se battrait à l’ombre, quelle question. »
Elle coupa la communication et se releva, le sourire toujours aux lèvres. La gamine était sympa, et avait une joie de vivre qui manquait au reste de l’équipe. Kyong-Hee était contente de l’avoir avec elle. Sans parler de sa compétence évidente.
Après un bon kilomètre de couloirs sales, elle trouva enfin ce qu’elle cherchait. Derrière une grossse cuve de gasoil, un espace avait été libéré en déboulonnant des parois. Des gens avaient vécu ici. Plusieurs sacs de couchage auto-gonflants étaient roulés dans un coin, à côté de sacs en plastique remplis d’emballages de rations de survie. Deux autres sacs avaient été bien fermés, et en s’approchant, Kyong-Hee sentit pourquoi : l’odeur d’excrément traversait même la barrière stérile. Un radiateur d’appoint, une lampe et du nécessaire de cuisine étaient rangés dans un sac de sport. De nombreuses personnes, toute une équipe, avaient passé un long moment dans ce trou à rat. Un peu plus loin, elle trouva une pile de livres et de revues. Elles étaient écrites en caractères arabes et cyrilliques. Un Coran et une Bible reposaient en-dessous.
De toute évidence, ceux qui avaient vécu ici comptaient revenir récupérer leurs affaires. Mais l’échec de leur mission dans la tour les en avait empêché. Pourtant, Kyong-Hee avait entendu que certains avaient pu fuir le laboratoire. Ils auraient dû repasser pour effacer leurs traces. Qu’est-ce qui avait cloché ?
Elle balaya le sol autour d’elle et vit enfin une piste. Une tâche de sang séchée, presque invisible sur la rouille. Il lui fallut toute la puissance de son optique pour la déceler. Elle s’approcha et en vit une autre. En suivant ces traces, elle contourna un pan d’acier et trouva dans l’alcôve le corps recroquevillé d’un homme en tenue de combat.
« — Mal’, préviens les autres. J’ai trouvé un corps. Probablement le type qui s’est enfui l’autre jour. »
En y regardant plus près, elle constata qu’il tenait dans sa main un injecteur à usage unique. Probablement un antalgique, ou un antiseptique. Ça ne lui avait pas servi à grand chose.
« — Au moins, Cillian n’aura pas à faire des pieds et des mains pour accéder aux autres. D’ailleurs, où en est ma couverture ?
— Tout baigne, la chef est passée voir ce type des Nations Unies, Casey. Officiellement, tu regardes ce qui cloche dans l’alimentation du poste de contrôle. J’ai simulé quelques surtensions pour rendre ça crédible.
— Parfait. Envoyez-moi quelqu’un, on doit remonter ce corps pour bosser.
— Reçu. »

*

Une fois le corps dissimulé, Cillian se mit au travail. Sans un bruit, comme toujours. L’Irlandais ne laissait que rarement un mot s’échapper hors de son épaisse barbe rousse, et jamais sans une bonne raison. Non pas qu’il se sentit particulièrement misanthrope. Mais la parole était une chose précieuse, selon lui, elle ne devait pas être gâchée en vain. Ne parler que lorsque c’était utile représentait une marque de respect envers ses interlocuteurs. Et puis, on l’écoutait plus attentivement.
Pourtant, il y avait une personne avec qui il aurait aimé parler. En y pensant, il vérifia les constantes vitales sur l’affichage tête haute de ses lunettes. Zacarias était stable. Indéniablement et désespérément stable. Ses blessures régénéraient bien, son cerveau montrait des signes de vie, mais il ne voulait toujours pas se réveiller. Cillian devait bien l’admettre, le géant colombien lui manquait. Il n’y avait pas de meilleur partenaire aux cartes, d’autant que Kyong-Hee était mauvaise perdante. Et il lui devait la vie, plus d’une fois. Le médecin aurait aimé réussir à payer sa dette.
Ses mains avaient travaillé toutes seules, comme d’habitude. Il préleva l’échantillon sanguin pour une analyse de l’ADN. Les cheveux et la salive étaient bien trop faciles à falsifier. Les empreintes digitales avaient été brûlées à l’acide, peu de temps avant l’opération, elles ne seraient d’aucune aide. En scannant le corps, il découvrit qu’il avait subi de nombreuses opérations chirurgicales. Certaines zones du cerveau avaient été modifiées pour rendre le mercenaire ambidextre, un implant que Cillian croyait n’être qu’au stade conceptuel. Son visage avait été reconstruit, de manière rudimentaire, sans doute lorsqu’il était plus jeune. Le reste du corps montrait de discrets renforts musculaires et osseux. Il avait fallu la puissance dévastatrice de trois fléchettes accélérées magnétiquement pour venir à bout de lui. Cillian était impressionné, et un peu envieux, il devait l’admettre.
La porte s’ouvrit sur le visage de Léa. Elle semblait frustrée, et ses mouvements trahissaient sa gêne. Elle mourrait d’envie de se débarrasser de son exosquelette, de toute évidence.
« — Cillian, tu as du nouveau ?
— J’ai presque terminé. »
Il plaça la fiole de sang dans une unité automatisée, où l’analyse débuta. Pendant ce temps, il confia à Léa une tablette sur laquelle il avait enregistré toutes les données recueillies. Elle la parcourue en hochant la tête, un sourire appréciateur aux lèvres.
« — Beau travail. C’était un vrai tueur, regarde cette liste d’implants !
— Oui. Il vous a échappé.
— Et donc ? » répliqua-t-elle en le dévisageant.
« — Relation de causalité. Il était bien équipé. »
Il fallu quinze secondes à Léa pour comprendre que c’était ce que Cillian considérait comme une tentative d’humour. Et ça la déstabilisa d’autant plus. Elle ne se doutait pas que l’Irlandais était équipé pour.
« — Combien de temps pour l’empreinte ADN ?
— Dix minutes.
— Tu pourrais régler ce truc en attendant ? J’ai l’impression d’étouffer… »
Il lui prit la tablette des mains et en tira un long câble, qu’il brancha sur une prise au niveau de la nuque, juste au-dessus du bloc énergétique de la combinaison. L’exosquelette était construit à parti d’un modèle de l’armée américaine, mais intégrait un module de bridage, de sorte qu’on ne pouvait pas s’en servir pour éclater un mur à coups de poings. Il était bardé de capteurs mesurant l’activité physique du porteur, et pouvait si nécessaire injecter des médicaments dans le flux sanguin, en cas d’urgence – Léa avait déconnecté cette option pour éviter les conflits avec son implant amphétaminique.
« — Vous n’en avez plus besoin. »
Il verrouilla la porte de la salle pendant qu’elle s’allongeait sur le dos, dans le lit voisin du cadavre. Tout d’abord, il déconnecta et enleva l’alimentation dans le dos. Cinquante kilos d’armature entravaient à présent les mouvements de la mercenaire. Puis il ouvrit les renforts des bras et des jambes, et enfin ceux qui verrouillaient le corps. Les capteurs se rétractèrent dans leurs logements, et Léa put se relever. Elle le remercia en hochant la tête.
« — Il reste des lésions internes, ne forcez pas pendant un mois.
— Bien sûr, je vais sagement rester derrière un bureau, comme d’habitude. »
Lorsque l’analyse fut terminé, Cillian enferma l’échantillon dans un sac stérile, et téléchargea le code génétique sur la tablette. Il effaça toute trace des copies locales et la rendit à Léa. Elle regarda la séquence avec un oeil appréciateur, quand bien même elle n’y comprenait pas grand chose.
« — On va enfin savoir contre qui on se bat. »

*

« — Ce mec est syrien ! »
Malékith lâcha l’info comme un pavé dans la mare, en soignant son effet. Le reste de l’équipe attendit patiemment qu’elle continue. Ils s’étaient de nouveau rassemblés dans le poste de contrôle, après avoir viré Stéphane une fois de plus. Il avait tenté de laisser un mouchard dans un des ordinateurs mais l’opératrice l’avait trouvé rapidement. Nyobe était arrivée en retard, prétextant une phase critique dans l’avancée de son projet. Voyant que le suspense tombait à plat, Malékith reprit.
« — Il s’appelle Ali Al-Misri. J’ai trouvé – enfin, le gamin a trouvé – son nom dans un fichier d’Europol. Il a d’abord participé à la première guerre civile syrienne dans les troupes gouvernementales, puis il a fait la seconde dans l’Armée de Libération, contre les islamistes de l’EIS. Cinq ans plus tard, on le retrouve dans le Caucase, en train de faire le tampon entre les indépendantiste et l’armée, pour le compte de la Russie. Il disparaît après le soulèvement de Grozny en 2029. Et le voici, sur Odyssée.
— Il y avait du matériel militaire de fabrication russe dans la planque au sous-sol. Du récent, de bonne qualité. Et les types qui nous ont attaqué sur le quai étaient organisés comme un commando d’élite de l’armée. » mentionna Kyong-Hee. Elle tapa dans le paquet de bidîs de l’Indienne comme s’il lui appartenait. Celle-ci ne s’en formalisa pas.
« — Vous pensez que le gouvernement russe voudrait s’attaquer à nous ? Dans quel but ? Et qu’est-ce que ça a à voir avec les recherches que nous menons ici ? » demanda Nyobe.
« — Hégémonie économique et technologique, conflit latent avec la Chine et les USA…
— Non, ça colle pas, » l’interrompit Léa. « — La Russie finance déjà Odyssée, alors quel intérêt ? Et puis aucun gouvernement n’investit dans les implants qu’avait ce mec, aucun n’en a les moyens. Il a dans le corps des prototypes bien en avance sur tout ce que j’ai vu, d’une bonne décennie. Qui sont les seuls, sur cette île, à avoir ce genre de moyens, et à engager des mercenaires comme nous ? »
Il n’y avait que deux réponses possibles : Diamond ou Northwind. Autrement dit, Marcus et Irina. Alors qu’elles s’entendaient pour mettre la main sur les formidables ressources minières de l’Antarctique, les trois multinationales lançaient en sous-main leurs soldats les uns contre les autres, laissaient des cadavres dans leurs sillages, pour une domination totale. Léa et son équipe n’avaient aucun alliés sur Odyssée, ils devaient se débrouiller seuls.
« — Mal’, trouve-moi des infos sur l’activité de Diaz et Doubinski depuis qu’ils sont arrivés sur l’île. Je suis à peu près certaine que ce sociopathe est responsable de l’attaque, mais on ne peut pas écarter de pistes. Je vais les trouver et leur faire cracher le morceau. Kyong-Hee et Cillian, vous restez en couverture.
— Tu veux pas qu’on reste avec toi ? » demanda la Coréenne.
« — Non. C’est personnel. »

*

Léa descendit jusqu’au milieu de la tour. Sous l’ombre de la corolle et les quartiers résidentiels des cadres, on cultivait en serres des plants génétiquement modifiés. Sur dix étages, il n’y avait que du verre et des bacs de plastique recyclés dans lesquels poussaient des agrumes, des tomates ou des pommes, gros comme des melons. Des grappes de courgettes et de fraises montaient jusqu’au plafond. L’air était très chaud et humide, et des diffuseurs déversaient une fine bruine enrichie en nutriments qui donnait à l’eau une couleur rouille. Des dizaines d’ouvriers s’occupaient des plantes, les corps recouverts de combinaisons stériles, de charlottes et de masques en carbone. Elle ne s’embarrassa pas de cet accoutrement.
Au détour d’une paroi transparente, elle vit deux silhouettes cachées par la brume. En face du vide entre la tour et le pilier central, juste en-dessous de la corolle. La discussion semblait animée, mais le bruit des gicleurs et des conversations l’empêchait d’entendre. Léa appuya son oreillette et ouvrit la ligne.
« — Malékith, qu’est-ce que je dois savoir ?
— Diaz est là depuis quatre mois, et à part terroriser quelques ouvriers, il n’a pas fait grand chose. La Diamond le tient en laisse, très serré. Doubinski a un peu plus de marge. Elle est arrivée il y a un mois, mais elle a déjà signé plusieurs gros contrats, et elle met la pression sur ses scientifiques, un vrai tyran de ce qu’on dit. »
L’intuition commença à assembler les données les unes avec les autres, comme si elles défilaient devant les yeux de Léa. Les faits s’ordonnaient, se croisaient.
L’ascenseur.
Les communications brouillées.
Les coupures de courant.
L’équipe dans les souterrains.
Le mercenaire syrien travaillant pour des russes.
« — Passe-moi Nyobe.
— Oui Léa, qu’y a-t-il ? » demanda la voix de la chercheuse dans l’oreillette.
« — Quelle est l’échéance de prévision d’un impact depuis la ceinture orbitale ?
— Attendez… Les modélisations les plus performantes permettent de prévoir à quarante jours maximum, en ne prenant en compte que les astéroïdes les plus massifs. Au-delà, le nombre d’objets est trop élevé pour qu’on puisse savoir avec précision quand l’un d’eux va tomber.
— Alors comment expliquez-vous qu’un de ces cailloux ait pu vous prendre par surprise le soir de l’attaque ? »
Sans attendre de réponse, elle avança en sortant son arme de son holster. Ses pas assurés, sa détermination renouvelée, elle savourait avec grand plaisir ce corps qui lui avait semblé être un fardeau ces dernières semaines. Elle éprouvait encore une gêne en bas du dos, mais toute sa précision était de retour. Elle se sentait bien. Elle se sentait fonctionnelle.
Pas le moment de faire dans la finesse. Elle leva l’arme, pointée bien droit vers Irina Doubinski, et entra dans la baie panoramique. Marcus la vit avant qu’elle ne passe la dernière porte de verre. Il sortit un gros revolver de sa poche et le tendit en face d’elle.
« — Me tente pas, l’oiseau. Surtout ne me donne pas une bonne raison.
— La ferme, Marcus. Ça ne te regarde pas, écarte-toi. »
Son air de mâle alpha et sa rage nickelée, tout ça donnait envie à Léa de lui en placer une dans la tête. Juste pour calmer ses nerfs. Mais elle devait rester concentrée sur la bureaucrate russe qui faisait une magnifique performance de stupeur, soigneusement orchestrée. Ça ne prendrait pas.
« — Bordel Fontaine, on est en terrain neutre, il y a des caméras partout. Ne nous fous pas tous dans la merde.
— Cette femme a envoyé deux équipes pour attaquer mes chercheurs, et un de mes hommes est dans le coma. Ça te mettrait pas en rogne, ce genre de chose ? »
Sans cesser de la tenir en joue, Marcus se déplaça sur le côté pour avoir Irina dans son champ de vision. Son regard passait d’une femme à l’autre alors qu’il prenait la mesure de la situation.
« — Doubinski ? Enfin, dites quelque chose ! Vous n’allez pas la laisser vous accuser comme ça ! »
La directrice leva les mains avec un sourire, comme si elle ne voyait pas du tout de quoi Léa voulait parler. C’était presque convaincant.
« — De toute évidence, cette chère Léa est en plein délire. Sans doute le stress de son agression. Ma chère, vous n’auriez pas dû revenir aussi vite en service.
— En plein délire, hein ? Nous avons retrouvé le corps d’un de vos mercenaires dans la petite planque que vous aviez aménagé, chargé à ras bord de biotech de combat. Vous avez profité des tirs du canon pour les faire monter jusqu’à notre étage, alors que les communications étaient brouillées. Marcus, tu penses vraiment que je peux la laisser partir ? Qu’est-ce que tu ferais, à ma place ? »
Elle voyait dans ses yeux le doute qui s’installait. Peut-être qu’elle avait tenté de lui vendre les secrets de la EagleEye, peut-être que c’était pour ça qu’ils s’étaient retrouvés ici. Mais à présent il voyait que le prix était trop élevé. Marcus était une brute sans scrupules, mais il était loin d’être idiot. Il n’allait pas sacrifier l’accès de la Diamond à Odyssée pour une alliance incertaine. Il jeta un coup d’oeil à Léa, puis baissa son arme.
« — Doubinski, si vous n’avez rien à vous reprocher, vous devriez la suivre. Au moins le temps que la sécurité examine les preuves. » dit-il à Irina. Celle-ci avait perdu son sourire diplomate et semblait vouloir le clouer au mur de verre du regard.
« — Pauvre imbécile. »
Avant que Léa ne puisse réagir, elle leva sa main droite, tenant un cylindre étroit et noir pour le lancer sur eux. La mercenaire eut juste le temps d’hurler.
« — Ky ! »
La vitre éclata derrière eux et le bras d’Irina fut violemment jeté en avant dans une gerbe de sang. Elle laissa tomber la grenade, qui roula de manière erratique pour se coincer sous le bac d’un gros plan de tomates. L’explosion projeta des éclats de verre brisé et des mottes de terre dans toute la pièce, Léa et Marcus tombèrent au sol, chaque parcelle de peau saignant de micro-coupures. Lorsque le choc se fut dissipé, Irina avait disparu.
« — Kyong-Hee, tu l’as vue ? »
De l’autre côté du vide, l’artilleuse remettait son fusil long en bandoulière et descendait déjà les escaliers.
« — Elle va vers le sous-sol ! Merde, désolé chef, je l’ai juste eu au bras. Je crois qu’elle veut atteindre les bassins de maintenance.
— Bien, rejoins-moi en bas. »

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