Elle ouvrit les yeux. Le jour se levait lentement sur l’horizon verdoyant des arbres, traversant les rideaux en pétales de fleur et répandant dans la pièce une clarté rosée. Elerinna se redressa lentement et s’assit sur le rebord de son lit en bois recouvert de plumes. Ses yeux bleus, fendu au centre par une pupille verticale, parcoururent la pièce dans laquelle elle vivait depuis qu’elle n’était qu’une enfant. Ses longs cheveux roses glissèrent le long de ses épaules tandis qu’elle se levait pour se rendre devant un meuble afin de prendre son petit dejeuner. Une nouvelle journée venait de commencer et Elerinna allait (comme tous les jours) participer aux activités organisées parmi les fées, soit cueillette, jardinage et pleins d’autres trucs du genre dont elle ne raffolait pas particulièrement … à moins qu’elle ne se dépêche et qu’elle puisse dans ce cas s’échapper pendant quelques heures dans la foret ou elle pourrait déambuler en paix parmi les géants verts, les animaux et la végétation luxuriante de la vallée. Les fées étaient des créatures de nature discrètes et qui possédaient la particularité d’avoir des ailes dans le dos, leur permettant ainsi de voler. Délicates et tranquilles, elles profitaient des beaux jours et passaient leurs journées à s’occuper de leurs maisons ou de la foret et à faire leurs provisions pour l’hiver. Elles aimaient avoir une belle maison douillette, une terre bien cultivée et de bonnes récoltes. Généralement, elles atteignaient l’âge de la maturité lorsque leurs ailes sortaient, leur permettant ainsi de devenir une fée à part entière et d’intégrer la communauté pour le reste de leur vie. Mais Elerinna ne possédait pas encore ses ailes. Ce qui signifiait qu’elle était encore sous la responsabilité de ses pairs tant qu’elle restait mineure.
– Quelle injustice tu ne trouves pas Cryptus ? demanda-t-elle a son petit compagnon des bois qui s’étirait paresseusement dans le lit.
Le petit renard-écureuil au pelage marron redressa les oreilles en entendant son nom.
– Allez, courage mon vieux, on pourra bientôt quitter ce village et aller s’installer ailleurs.
Le continent d’Enenvial était vaste, mais Elerinna savait déjà ou elle voulait s’installer plus tard. De l’autre côté de la rivière Este s’élevait une petite ile ou peu de fées s’aventuraient. Afin d’échapper à leurs regards, Elerinna voulait y construire sa maison et vivre seule avec Cryptus. Elle partit donc prestement vers l’ouest, filant plus vite qu’une luciole entre les troncs centenaires. Une fois sur le bord de l’eau, elle sauta sur de petits rochers gris recouverts de mousse qui effleuraient la surface de l’eau comme le dos des racines sur les chemins et commença l’ascension. Elle escalada le rocher, s’agrippant au lierre et autres plantes, agiles et furtive. L’ile possédait une vue imprenable sur la vallée des fées, offrant au spectateur la mer bleue et l’océan vert des arbres. A l’ouest on pouvait apercevoir la chaine de montagne qui séparait la vallée du reste du continent et au nord celle qui les séparait de la vallée des lutins. Durant certains jours, on pouvait même apercevoir la fumée qui s’échappait de la montagne du destin, demeure des tres honorables Sphynx, et à l’Ouest, la capitale des fées située entre les montagnes jumelles. Parmi les broussailles, entre deux chênes, Elerinna avait construit un abri précaire qui pouvait abriter une fée assez fine. Ce petit oasis de paix lui offrait tout ce qu’elle pouvait rêver : du calme et de la tranquillité, ici, elle se sentait chez elle. Depuis sa tendre enfance, Elerinna n’avait pas voulu se lier d’amitié avec aucune fée, de toute façon elles se moquaient d’elle ! Elle se sentait différente des autres … comme étrangère. Elle avait perdu ses parents lors d’un incendie qui avait ravager les cotes. Enfin, c’est ce que les fées lui avaient raconté ! Soudain, une tache sombre attira son regard. Des nuages noirs se massaient au large, menaçants, et le tonnerre grondait furieusement. La tempête serait là ce soir. Une crampe lui comprima le ventre. Paniquée, Elerinna posa ses mains sur son ventre pour calmer la douleur. Cryptus s’approcha d’un pas incertain vers sa maitresse, il posa ses grands yeux violets dans les yeux bleus ciel d’Elerinna qui lui caressa le dos pour le rassurer. Le petit animal ronronna de bonheur et se frotta contre ses jambes.
– Ca va aller, lui dit-elle, que dirais-tu d’un bain ?
La boule de poil secoua catégoriquement la tête et sauta sur les rochers en contrebas. Il se retourna et attendit sa maitresse.
– Toi quelque chose me dit que tu voudrais bien aller chercher quelque chose à te mettre sous la dent ! s’écria Elerinna, n’as-tu pas honte petit goinfre ??
Pour toute réponse, il s’éloigna vers les fourrés. La jeune fée soupira bruyamment et suivit son petit compagnon qui sautillait joyeusement au bout du chemin.

Elerinna rentra en fin de soirée au village. Les lampions accrochés répandaient une douce lumière orangée pour certain, rose pour d’autre, bleu, vert, violette …. L’agitation qui régnait dans les rues étonna la jeune fille. Le village qu’elle habitait était peuplé de fées des roches. Il existait différents types de fées sur tout le continent qui pouvait influencer différents types d’éléments. Ce n’est que lorsqu’elle entendit des cris qu’elle sut pourquoi tant de fées étaient de sorties. Elle approcha d’une petite maison ornée d’hortensias multicolores ou une dizaine de fées étaient attroupées. Les cris retentirent une nouvelle fois. Elerinna se leva sur la pointe des pieds, tentant d’apercevoir l’heureuse élue. Allongée à plat ventre sur une table en bois noir, la jeune fille gémissait tandis que ses parents épongeaient en souriants le sang qui se répandait sur le plancher. Soudain, après un dernier effort, une paire d’aile jaillit de son dos ensanglanté, immediatement suivi des cris de surprise des fées attroupées. Elerinna savait qu’il ne faudrait que quelques minutes avant que la nouvelle paire d’aile ne sèche. La jeune fille s’éloigna l’âme en peine vers sa petite hutte à l’extrémité du village, puis elle se coucha dans son lit de plumes bleues en rêvant des ailes qui lui pousseraient bientôt à elle aussi.

Ce n’est que lorsqu’elle ouvrit les yeux qu’Elerinna devina la gravité de la situation. Son esprit était encore embué par le sommeil et elle mit du temps à comprendre ce qui se passait. De la fumée pénétrait dans sa chambre par le bas de la porte. La jeune fille toussa bruyamment et se précipita vers la porte. Tirant sur la poignée, elle l’ouvrit d’un coup pour tomber dans une scène de massacre. Des flammes léchaient les murs des maisons délicates qui s’écroulaient dans de grands bruits. Des fées fuyaient, volant le plus vite possible vers la forêt protectrice pour finir dans les gueules de terribles monstres qui les attaquaient. Des monstres habilles entièrement de noir pourchassaient sauvagement les fées avec des armes, embrochant celles qui avaient le malheur de passer a proximité des créatures. Elerinna remarqua alors la présence d’un de ces horribles monstres qui s’approchait en braquant sur elle son arme. Ses yeux globuleux la fixaient d’un air malsain et sa bouche s’ouvrait et se fermait comme celles des poissons, révélant des petites dents pointues et recourbées. Avant qu’elle ait pu esquisser le moindre geste, il lui planta l’objet dans la poitrine. Lorsqu’il retira sa lance, un flot de sang s’échappa de la plaie. La douleur était terrible. Elerinna s’écroula en hurlant de douleur pour se réveiller l’instant suivant, allongée dans son lit. Elle se redressa, la sueur lui collait à la peau et sa gorge lui piquait affreusement. Une fumée s’échappait du dessous de la porte. Elle toussa bruyamment et se précipita vers le panneau de bois saisissant au passage Cryptus qui poussait de petits cris plaintifs sur l’oreiller. Une seconde avant de saisir la poignée, elle retint son geste. Pétrifiée de peur, elle se rendit compte de deux choses : la première était qu’elle entendait des cris et le vol précipité des fées qui tentaient de s’enfuir. La deuxième était une chose si ahurissante qu’elle ne pouvait y croire. Son rêve se réalisait. Comment une telle chose était-elle possible ? Le souvenir de la lance plantée dans sa poitrine refit surface. Elle s’éloigna donc de la porte pour se diriger vers celle de derrière. Précautionneusement, elle l’ouvrit Elle remercia les Dieux de lui avoir fait habiter une maison a l’écart des autres et s’enfuit vers la foret. La fumée était dense et lui piquait les yeux et la gorge, ralentissant sa course. Puis elle se rappela que des immenses monstres se trouvaient à l’orée de des bois, elle changea donc de direction et couru vers la rivière de l’autre côté. Lorsqu’elle arriva a proximité de la falaise, elle vit des bateaux noirs sur la plage. Les monstres etaient-ils arrives par la mer ? Le vent lui fouettait le visage, le feu parcourait le village comme un guépard affamé, dévorant tout sur son passage. Elerinna atteignit le couvert des arbres mais ne s’arrêta pas pour autant, elle fila le plus vite qu’elle le put en direction de son refuge. Pour avoir fait le chemin un bon millier de fois elle retrouva sa route dans le noir, éclairé par la lumière des flammes qui s’éloignaient. Une fois en haut elle se blottie dans le fond de son repaire et pleura en tremblant de peur, blottie contre un des deux imposants troncs. Ici les flammes ne viendraient pas, le cours d’eau et la hauteur des rochers les arrêteraient. C’est dans le désespoir le plus profond, face au massacre des fées et à la destruction de son village qu’Elerinna, morte de peur et assaillit par la fatigue, finit par sombrer dans le sommeil.

Lorsqu’elle se réveilla le matin, le silence régnait dans les bois. Elerinna retourna discrètement vers le village, Cryptus sur les talons.
– Il ne faut pas faire de bruit Cryptus, sinon …
Le petit renard-écureuil releva la tête et couina doucement.
– Ne t’inquiète pas, je ne les laisserais pas te faire du mal ! affirma-t-elle d’un air résolu.
Elle finit par atteindre l’ancien village. Il ne restait que des ruines. Les jolies petites maisons étaient complètement détruites et la jeune fille avait du mal a reconnaître les rues. De part et d’autres, des corps calcinés étaient visibles. Elerinna mis une main sur sa bouche et retint un vomissement de dégout. L’odeur était insupportable ! Elle parcouru le village sans trouver la moindre fée encore vivante. Des colonnes de fumées noires s’élevaient doucement dans le ciel. Cela suffirait-il à alerter les fées de la vallée ? A moins qu’elles ne soient mortes elles aussi ! Elerinna chercha les restes encore utilisables qui pourraient lui servirent. Peut-être pourrait-elle aller aux montagnes jumelles ? Là-bas, elle serait surement en sécurité … Peut-être que le roi Aaron lui donnerait le logis ? Elle découvrit pendant ses fouilles un sac, mais aucun fruit ni légume, surement tous brulés. Repoussant une poutre du bout du pied, elle fit une curieuse découverte. Une lance. Elle était grande, d’un noir qui semblait absorber la lumière du jour. De petites pierres ornaient le manche. Mais ce qui était le plus inquiétant, c’était la lame ! Fabriquée dans une pierre transparente, mais légèrement teintée de noir, des spirales obscures semblaient se mouvoir a l’intérieur. Elle semblait comme maléfique, gorgée d’une puissance sombre comme la nuit. Lorsqu’elle voulut s’en emparer, Elerinna reçu une décharge qui lui fit lâcher l’objet. Elle vit la tache noire s’etendre sur la peau de ses doigts, puis se résorber. Elle effleura du bout des doigts sa peau intacte.
– De plus en plus étrange, dit-elle.
Cryptus s’approcha craintivement de sa maitresse.
– Regarde ca Cryptus ! s’exclama soudain Elerinna en pointant du doigt les colonnes noires qui montaient dans le ciel, on dirait qu’il y a de la fumée dans les villages au nord, et au sud aussi !
En effet, des colonnes noirâtres s’élevaient des villages alentours. La jeune fille jetait des coups d’œil apeurés vers ces masses sombres.
– Tu sais ce que je pense, lui fit-elle avec un air sérieux, Je pense que ces … horribles choses s’en sont prises aux villages côtiers !
La fée serra le sac entre ses mains et regarda le petit renard-écureuil.
– Viens Cryptus, je ne sais pas s’ils vont revenir, mais je veux quitter cet endroit au plus vite !
Et elle ramassa le petit sac en feuille, puis s’éloigna en direction de la forêt. Une fée pouvait survivre plusieurs mois voir toute une vie dans les bois si elle était assez expérimentée. Et puis, la valle des fées n’était pas peuplée de prédateurs dangereux. Elerinna était confiante. Son entrainement de fée lui servirait finalement a quelque chose !

Pendant toute la journée, Elerinna pris soin de rester sous le couvert des arbres. Elle marcha jusqu’au coucher du soleil. Puis, elle s’installa dans un arbre, entre deux grosses branches feuillues, et dormit. Au lever du jour, La jeune fille chercha un point d’eau pour se laver. Apres une journée de marche, un bon bain lui ferait le plus grand bien ! Elle trouva un ruisseau en fin de matinée. Elle remonta le cours d’eau et trouva une retenue assez profonde qui lui arrivait à la taille. C’était un endroit décoré de fleur blanche qui pendait en grappe au-dessus de l’eau. Le feuillage d’un saule pleureur descendait quant à lui sur le côté ouest, cachant une petite mare ou quelques poissons colorés se pourchassaient et ou les libellules filaient au-dessus de la surface de l’eau. Elerinna détacha sa robe bleue tachée de suie et s’enfonça dans l’eau. Le liquide froid se referma peu a peu sur elle, chassant les taches noires et la sueur de la longue journée de marche. Cryptus s’installa sur une pierre plate au soleil et s’endormit en poussant un petit soupir de contentement.
– Je crois que nous avons bien mérité un petit moment de détente, n’est-ce-pas cryptus ?
Le petit animal poussa un petit soupir prolongé et ferma les yeux.
– Ce lieu est extraordinaire ! murmura Elerinna, c’est tellement calme, on ne croirait presque pas que des créatures armées attaquent les cotes !
Elle frissonna. Le seul fait de se rappeler de cette nuit d’horreur la faisait trembler et lui inspirait une peur impensable …
– Il faut absolument que l’on prévienne les autres villages, imagine qu’ils s’aventurent jusqu’ici !
Elle ouvrit de grands yeux bleus effrayés et ses pupilles rétrécirent tant elle était horrifiée. Cryptus couina, il n’aimait pas que sa petite maitresse se fasse des idées. Il finirait par y croire lui aussi au bout d’un moment ! Il se leva et entra dans l’eau. Nageant jusqu’à sa maitresse avec ses petites pattes blanches, sa queue trainait derrière lui comme un étendard. Il commença à tourner autour d’Elerinna qui rigola en le suivant des yeux.
– Mon pauvre Cryptus, tu vas vraiment être trempé ! s’écria joyeusement Elerinna.
Le petit animal sortis finalement de l’eau et s’affala sur l’herbe tendre après s’être soigneusement secoué dans tous les sens. Elerinna préféra rester encore un peu dans l’eau. Elle se laissa flotter, éparpillant ses cheveux roses autour de sa tête, et ferma les yeux.
La forêt brulait. Le feu se propageait d’un arbre à l’autre, semant la destruction sur son passage. Les plantes qui se laissaient toucher par l’entité flamboyante semblaient se racornirent, noircirent et s’effriter avant de disparaître pour toujours ne laissant qu’une terre noire torturée. La forêt défilait sous Elerinna à une vitesse folle. Elle volait ! Sous elle, une multitude d’êtres difforme courait vers un petit village couvert de fleurs, ils enflammaient les arbres avec de longues torches, et tuaient toutes les choses qui leur barraient la route. Soudain, Elerinna piqua vers le sol.
Pour se heurter à un mur invisible.
L’onde de choc se propagea comme une goutte qui tombe dans une mare calme, pour révéler la présence d’un gigantesque dôme qui recouvrait toute la surface du village. D’autres fées (à l’intérieur cette fois) essayaient en vain de s’enfuir vers le ciel pour se heurter elles aussi contre la paroi. Mais c’était le mauvais coté du dôme. Les autres filaient vers l’orée du bois pour finir dans les pattes des scorpions géants qui leur arrachait les ailes et les écrasait sous entre leurs mandibules. Elerinna glissa le long de la paroi pour s’écraser au sol. Elle se redressa et regarde le désastre autour d’elle C’est là qu’elle vit une chose qui la terrifia. Une fée noire. Une fée, vêtue d’une curieuse combinaison noire qui reflétait la lumière des feux semblait maintenir le dôme en propageant son énergie vers lui. C’était un homme, jeune et élancé, aux cheveux noirs coupé mi- long. Une longue épée grise et noire pendait à sa ceinture. Il tourna la tête vers la jeune fée. Ses yeux étaient blancs, comme opalescent, ils resplendissaient dans la pénombre et réfléchissaient la lumière des flammes. Un sourire sadique étira ses lèvres pour révéler des dents pointues qui renvoyèrent un éclat sauvage. Il détourna ses mains en visant la fée. Le dôme disparu, libérant les fées prisonnières. Une lumière malfaisante apparue à l’extrémité de ses mains couvertes de sang, l’énergie maléfique fusa vers Elerinna. Et l’atteignit.

Elle se réveilla en hurlant. Cryptus sursauta et se releva précipitamment pour se rendre au chevet de sa maitresse. La jeune fille était allongée au pied du Saul pleureur, la nuit était tombée depuis longtemps et la lune était haute dans le ciel. Elerinna appuyait en vain ses mains sur sa frêle poitrine, tentant d’apaiser le feu qui la faisait souffrir. Elle dégagea son torse, laissant apparaitre au clair de lune une curieuse marque noire qui s’estompait.
– Mais qu’est-ce-que c’est que ça bon sang ???? s’écria-t-elle morte de peur.
Cryptus frotta délicatement son petit museau sur sa main tremblante. Elerinna referma sa robe.
– C’était le même rêve Cryptus, exactement le même, sauf que c’était un autre village qui était attaqué.
Elle réfléchit. Si son rêve était prémonitoire, car le précèdent l’étais, pouvait-elle changer le cours de l’histoire ? En y réfléchissant, peut-être qu’en étudiant les moindres détails, elle arriverait a savoir ou et quand l’attaque aurait lieu ?
– Si je te dis que je volais, dit-elle, que je volais au-dessus de la foret, et si c’est un de ses rêves qui prédisent l’avenir, alors cela se passera lorsque j’aurais atteint l’âge adulte ! s’exclama-t-elle soudain, Cryptus, je sais quand cela va se passer !
L’animal releva la tête. Elerinna soupira et se leva. Elle se saisi du sac qu’elle avait pris le temps de remplir de vivres pendant sa marche et partis en direction de la foret. Crytpus émit un cri de désespoir. Il ne pourrait plus dormir, Elerinna était beaucoup trop agitée !

Pendant qu’elle marchait, Elerinna réfléchit. Tout d’abord, elle se posait des questions quant à son étrange faculté à voir le futur. Son rêve la préoccupait. Les peuples d’Enenvial ne s’attaquaient jamais netre eux. Tout n’était que paix sur le continent depuis fort longtemps. Puis, elle repensa à la curieuse fée noire. Cet homme semblait vouloir aider leshorribles monstres à massacrer les fées par une méthode tout à fait ignoble qui consistait à les enfermer et a les exterminer jusqu’à ce qu’il n’y ait plus âme qui vive. Puis il y avait eu ce rayon obscur qu’il lui avait lancé… Quelle était cette magie ? Il avait tiré sans aucune hésitation. Pendant qu’Elerinna ruminait de sombres pensées, Cryptus avait déniché une petite place confortable dans le sac, entre une grosse tomate rondouillarde et quelques fraises des bois toutes maigrichonnes comparées aux grosses fraises dégoulinantes de jus que faisaient pousser les fées. Il ressentait la peur et la colère de sa maitresse mais ne voulait pas intervenir. De toute façon qu’aurait-il pu faire ? Il n’était qu’un animal de compagnie ! Il se laissa donc balloter contre le dos d’Elerinna, espérant qu’elle aurait la force de surmonter l’épreuve que le destin lui avait imposé.

Ce n’est qu’en fin d’après-midi qu’Elerinna arriva au village le plus proche. Les fées finissaient de récolter les framboises et les fraises pour en faire de délicieuses confitures maison. Les délicates créatures levèrent la tête lorsqu’elles virent Elerinna approcher, sortant de la couverture émeraude des arbres. Lorsqu’elles virent l’état épouvantable de sa robe et son air fatigués, elles volèrent jusqu’à elle, lui proposant immédiatement le logis et le couvert. Tant de charité lui fit chaud au cœur, et Elerinna éclata en sanglot devant les fées interloquées. Une femme aux longs cheveux roux ornés de feuilles de châtaigniers et de plumes de geai s’avança et entoura Elerinna de ses bras protecteur :
– Laissez-la donc ! s’exclama-t-elle, vous ne voyez pas qu’elle est à bout de force ? Rentrez, je m’occupe d’elle.
Les fées s’éloignèrent, et reprirent leurs activités en chuchotant à voix basse, jetant quelques coups d’œil à Elerinna.
– Excusez les, lui dit la belle fée, nous n’avons plus eu de nouvelle des fées des roches sur la cote depuis plusieurs jours … Vous venez de la n’est-ce-pas ?
– Oui, répondit doucement Elerinna, veuillez m’excuser, cela fait longtemps que je n’ai pas parler à une personne depuis l’incident !
La fée fronça les sourcils.
– Quel incident ? Vous voulez parler de la cause de cette fumée noire ? Un incendie a détruit votre village ?
Quelques fées relevèrent la tête.
– Que diriez-vous d’aller parler de ça dans ma maison ? Puisque vous n’êtes pas encore majeure nous allons marcher, mais au moins vous verrez tout le village !
Elerinna hocha doucement la tête, et se laissa mener par la belle inconnue vers sa maison située sous un imposant châtaignier. Une fois à l’intérieur, Anelle (car c’est comme cela qu’elle s’appelait) proposa a Elerinna un bain dans la mare extérieur. Une fois la jeune fille nettoyée et rafraichie, la fée lui remit une galette de blé, le met favoris des fées. Lorsqu’elle eut fini d’avaler la nourriture, Anelle s’approcha d’Elerinna :
– J’aimerais que vous m’expliquiez ce qui s’est passé, exigea la fée, l’autre matin, nous nous sommes réveillées, des nuages de fumées s’élevaient vers le ciel. Quelques unes de nos fées sont allées voir ce qui se passait. Elles ont découvert cinq villages détruits ! Tout le monde est terrifié, expliqua la femme avec des yeux inquiets, Quel danger nous menace ?
Elerinna baissa piteusement la tête et retint du mieux qu’elle put les tremblements de ses mains.
– J’ai peur que nous ne puissions rien faire, chuchota Elerinna, vous ne me croirez surement pas si je vous expliquais ce qui nous menace ! Il faut fuir … ou mourir.
Anelle ouvrit de grands yeux terrifiés, une fée ne mentait jamais sur quelque chose de si grave !
– Dite-moi ! ordonna la fée, je veux savoir ce qui arrive à notre peuple qui soit si grave ! Un feu ne peut être la cause d’un si grand malheur !
– Je ne sais pas si le danger s’aventurera jusqu’ici, mais il faut se tenir prêt à tout. Nous sommes envahis, Anelle. Nous sommes envahis par des créatures obscures ! Il faut fuir le plus loin possible des côtes, c’est le seul moyen, il faut partir à l’ouest et prévenir les autres fées !
Anelle se leva doucement. Elle se dirigea vers la fenêtre.
– Anelle ! appela Elerinna désespérément, il faut prévenir les autres maintenant ! Ils peuvent revenir d’un moment à l’autre !!!!
– Une telle chose n’est jamais arrivée… Les fées n’ont jamais quitté la vallée ! Où iront-elles ?
– Vous savez quoi ? je ne sais pas où nous iront, tout ce que je sais c’est que des ennemis approchent de votre village ! Ils vont tous nous massacrer !
– En cas de besoin les fées peuvent s’envoler et fuir jusqu’à la capitale ! A quoi ressemblent ces créatures ?
Elrinna réfléchit un long moment et lui décrit les êtres qu’elle avait vu :
– Ils sont petits mais s’ils se redressaient, je pense qu’ils feraient notre taille. Ils sont recouverts d’une espèce de vêtement noir. Enuméra-t-elle, et leurs yeux sont gros, un peu comme ceux des poissons ! Leurs dents sont petites mais pointues.
Puis, elle se rappela de la fée noire qu’elle avait vue en rêve.
– Mais il y a autre chose …
– Quoi ? demanda Anelle en soupirant d’un air détaché, que peut-il y avoir de pire ?
– Une fée noire. Un peu comme nous, sauf qu’elle est … différente. C’est elle qui a créé un dôme au-dessus des villages ! Et puis elle avait une telle expression de rage sur son visage ! C’est comme si elle avait été … transformée en monstre.
Anelle se retourna lentement et approcha d’Elerinna pour lui saisir violement les épaules :
– Qu’as-tu dit ??!! Une fée noire ?!
– Vous me faites mal ! s’écria la jeune fille, mais lâchez moi !!!
Anelle recula en tremblant et s’effondra sur sa chaise.
– Malédiction ! murmura-t-elle en se passant la main sur le visage.
– Qu’y a –t-il ? Pourquoi avez-vous cette réaction ? Qu’est-ce que j’ai dit qui puisse vous mettre dans cet état ?
Comme Anelle ne répondait pas, Elerinna lui saisit le visage entre ses mains et planta son regard dans le sien.
– Maintenant vous me dite ce que vous savez ou je vous promets que vous allez le regretter ! lui déclara-t-elle, c’est tout mon village qui a péri ! J’aimerais au moins savoir pourquoi.
Anelle gémit, retira les mains d’Elerinna de son visage et prit une inspiration :
– Je … je ne sais pas trop, bégaya Anelle en passant la main dans ses cheveux, je suppose que vous connaissez l’histoire de la Grande Catastrophe, la ‘’séparation’’ de notre continent il y a des milliers d’années de cela ?
Elerinna hocha la tête. La Grande Catastrophe. La pire chose qui soit arrivé a leur monde depuis sa création. Tous les parents racontaient l’histoire malheureuse de cet incident a leurs enfants, les enfants a leurs enfants, et ainsi de suite. Une chose de cette ampleur ne pouvait tomber dans l’oubli. Mais cela remontait il y a déjà si longtemps que chacun se demandait si ce n’était pas plutôt des contes fantastiques …
– Apres la Grande Catastrophe, une rumeur s’est répandue que l’autre partie de l’ancien continent existait toujours et qu’ils étaient peupler de choses horribles … Il se pourrait que les créatures qui ont attaqué ces villages, dont le tien, ne fassent qu’un avec les créatures de ce qu’on appelle maintenant le Continent Maudit.
– Peut-être, réfléchit Elerinna, mais pourquoi cette réaction envers la fée noire ?
Voyant qu’Anelle ne voulait pas céder, Elerinna lui pris ses mains et les serras avec insistance,
– S’il vous plait Anelle, pour moi, et pour toutes les fées qui sont mortes.
La fée leva sur elle de grands yeux effrayés.
– Il ne faut pas que les fées s’affolent, chuchota-t-elle, il paraitrait qu’il existe une formule ou une espèce de sort, on ne sait pas trop, qui pourrait transformer une fée en créature de l’ombre. La folie de cette magie les détruirait et les transformerait. Elles deviennent des Daerons, des espèces de monstres horribles a l’apparence de fée. Et il arrive que certaines fées possèdent des pouvoirs spéciaux que les dieux leur sont offerts et …
‘’Comme moi, pensa Elerinna, comme mes rêves qui prédisent l’avenir !’’
– Comme quoi par exemple ? s’exclama-t-elle
– Le fait de parler le langage des animaux, de contrôler des éléments et d’autre encore ! Mais si cette fée devient une Daeron, un démon, ses envies sont de tuer et de détruire. Rien ne peut l’arrêter, et ses pouvoirs l’aide grandement à accomplir son travail de destruction. La fée que tu as vu est maléfique, éloigne toi d’elle et mieux tu iras !
Elerinna retint un énième soupir de découragement et posa enfin la question qui lui brulait les lèvres :
– Je … Je crois que je possède l’un de ses présents offerts par les dieux, lui confia-t-elle, mais je n’ai aucune idée de comment l’utiliser ! Vous savez comment je pourrais … m’en servir ?
– Duquel s’agit-il ? s’enquit Anelle, es-tu sure que tu en possèdes un ?
– Oui, j’en suis sure, affirma Elerinna, je crois que je peux voir ce qui se passera dans le futur, l’avenir.
– Alors cela ne m’étonne pas que tu aies pu t’en sortir ! Tu as le don, ma chère, lui dit Anelle en souriant, Et crois-moi, il te servira ! Que dirais tu d’aller informer les autres à présent ? Elles méritent de savoir ce qui nous menace, viens avec moi !
Sur ce, elle emmena Elerinna et cryptus vers la place centrale du village. Les fées écoutèrent horrifiées le destin tragique de leur congénères et furent encore plus terrifiées d’apprendre que les meurtriers pourraient revenir a tout moment.
– Je propose d’alerter les villages voisins, ainsi que toute la région, ces êtres infâmes ne tueront plus qui que ce soit ! expliqua Anelle.
– En tout cas ça ne les empêcheras pas de bruler nos maisons, bougonna Elerinna dans son coin.
– Elisa, Afanie et cristie, vous irez au sud, ordonna Anelle, alertez les villages que vous verrez de faire de même avec les autres villages alentours !
Les trois fées partirent sur le champ.
– Lilas, laude et Prim, vous, allez au Nord ! Abageille, Mira et Sam à l’Ouest, et Salie, Myrtille et Friso, à l’Est ! Toutes les autres, prenez le nécessaire et partez vers l’Ouest, allez au village le plus éloigné. Allez à la capitale. Allez alerter le roi Aaron de la catastrophe qui nous touche.
– Et moi ? demanda Elerinna, ou je vais ?
Anelle la regarda et dit :
– Suis les fées vers l’Ouest, décida-t-elle.
– Mais je veux aider les fées, je connais ces créatures pour les avoir déjà vu, laissez-moi vous accompagner !
– Nous risquons une attaque d’un instant à l’autre !
– Non, dans mon rêve je volais, j’étais majeure lorsqu’ils attaquaient !!! Ils n’attaqueront pas tant que je n’aurais pas mes ailes !
– En es-tu sure ? demanda Anelle
– Oui, je l’ais vu !
– Ça te vas si je te porte jusqu’au prochain village ? la questionna-t-elle
Elerinna souri de toutes ses dents
– Oui, c’est parfait !
Cryptus couina sur son épaule.
– Tu n’auras qu’à te glisser dans mon sac ! lui proposa-t-elle, tu y seras bien, tu verras !

La nuit tombait sur la vallée. Des fées volaient vers l’Ouest, et on pouvait voir leurs ailes scintiller au loin. Une fois son village désert, Anelle partit avec Elerinna et cryptus. Elle avait revêtu une tunique verte et en avait proposé une à Elerinna qui avait accepté le vêtement. Anelle avait alors étiré ses ailes dans la pénombre du soir, projetant de petits éclats de lumière colorés sur les murs des maisons autour de la petite place.
– Tu en auras, ne t’inquiète pas, lui avait-elle dit lorsqu’elle avait aperçu son regard envieux.
Elle l’avait par la suite saisi par la taille et ses ailes s’étaient mises à battre rapidement, ce qui souleva un nuage de poussiere et de pétales. Elerinna fixait le ciel, attendant le moment du décollage avec curiosité. Ce n’est que lorsqu’elle vit le paysage défiler sous elle qu’elle se rendit compte qu’elle avait DEJA décollé ! Le paysage de la vallée au crépuscule était à couper le souffle. Le soleil descendait sur la mer, projetant sur la foret de verdure ses derniers rayons orangés, offrant ainsi la vue d’un désert mousseux ou quelques lampions projetaient par ci par là, leur lumière blanche. Puis il y avait eu cette tâche, ce grand feu qui ravageait un village au Sud, point lumineux qui semblait dévorer la mer.
– Ils sont là, s’écria Elerinna, regardez Anelle, ils massacrent la cote au Sud !!!!!
– J’ai vu, fit-elle tout simplement
Elle se dirigea un peu plus à l’ouest, afin d’éviter la tuerie.
– Mais que faites-vous ?! s’écria Elerinna, nous n’allons pas les aider ?
– Non.
– Mais ils ont besoin d’aide !!!!!!
– C’est trop dangereux. Les fées ne sont pas des guerrières.
– Vous allez les laisser mourir ? s’horrifia Elerinna, je pensais que les fées étaient plus courageuses que ça ! cracha-t-elle, Mais oui, nous sommes des lâches, allons bon !!!
– C’est trop risqué de s’approcher de ce village, déclara Anelle, nous allons à l’Ouest et si tu n’es pas contente alors je te dépose à terre !
– Eh ben allez-y ! lui cria Elerinna, je ne vous en empêche pas ! Au moins j’aurais la conscience tranquille !!!!!
Mais la fée s’éloigna en direction d’un autre village, loin du massacre qui avait lieu sur la cote. Elerinna pleurait. La vie était tellement injuste ! Soudain, Anelle fit un écart brutal sur la droite.
– Que se passe-t-il ?! s’écria Elerinna
– Un …
Elle n’eut pas le temps de dire autre chose qu’une gigantesque queue sortait du couvert des arbres en pointant sur les deux fées sont dard remplis de poison mortel. Anelle s’éleva plus haut et échappa à l’attaque mortelle du scorpion.
– Leur queue est plus longue qu’elle n’en a l’air !
Elerinna acquiesça de la tête. Elles continuèrent en direction d’un amas de rochers, le village se trouvait derrière. Lorsque la fée tourna autour du grand rocher, elles découvrirent une autre scène de malheur. Un autre village était en feu, assailli par des gobelins et leurs monstres aux allures de scorpions géants. Anelle n’eut pas le temps de s’arrêter. Elle perdit l’équilibre et piqua vers le village. Les deux fées se heurtèrent au dôme d’énergie. Comme dans son rêve, Elerinna vis avec horreur l’onde de choc se propager. Elles glissèrent le long de la paroi et s’écrasèrent sur le sol, soulevant un nuage de cendre et de poussière. Elerinna se releva tant bien que mal et l’aperçu. La fée noire. Mais cette fois-ci, elle savait quoi faire, elle se rendit le plus vite possible près d’Anelle pour l’aider à se relever. La fée était salement amochée, l’une de ses ailes était tordues, sans doute à cause de la chute.
– Anelle ! C’est comme dans mon rêve ! Il faut partir ! la secoua Elerinna.
– Peut pas … trop mal.
– Aller, dépêchez-vous bon sang !!!! Vous voulez mourir ou quoi ?! se fâcha Elerinna, il va etre trop tard !
– Quelle belle petite réunion, vous permettez que j’y assiste ? fit une voix ténébreuse dans leur dos.
Elerinna se retourna pour découvrir la Daeron, La fée noire qui l’avait attaqué dans son rêve. A ce souvenir, Elerinna se fâcha, son joli visage vira au cramoisie et elle lança à la fée maléfique un regard à glacer le sang.
– Vous ! lui pointa-t-elle du doigt, je vous haie espèce de psychopathe !!!! hurla-t-elle en se rapprochant dangereusement de la Daeron, vous les avez toutes tuées !!!!
Le même sourire sadique déforma le fin visage de la fée, dévoilant ses crocs.
– Ne t’inquiète pas pour ça, jolie petite fée, ricana-t-il, tu vas vite les rejoindre !
Soudain, Elerinna se sentit tirer vers le ciel. La Daeron chargea aussitôt ses mains de la même énergie noire qui l’avait tué et visa la jeune fée qui s’éloignait. Mais Elerinna avait prévu le coup.
– Tu ne m’auras plus comme ça, sale traitre ! hurla-t-elle avec toute la haine du monde, tu m’entends ?!
Et sur ce dernier mot, avec toute l’adresse dont elle était capable (et qui ne sait pas que les fées sont adroites !) elle fit un geste avec sa jambe et lui balança sa chaussure à la figure. La, deux choses se produisirent. Premièrement, la chaussure se teinta d’une aura rosée et, deuxièmement, cette dernière, transformée en comète rose, atteignit sa cible au poitrail, projetant la Daeron à terre. Puis ce fut le noir total.

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