– Es tu sûre de vouloir faire cela Elenya ?
Les trois compagnons s’étaient réfugié dans la cave secrète du tavernier. L’obscurité avait envahi la pièce des l’instant où se dernier avait refermé la porte derrière lui. Malgré cette obscurité, on pouvait apercevoir les nombreuses bouteilles, jambons et autres morceaux de viandes qui s’entassaient dans la petite pièce. Un vrai repaire de contrebandier. L’aubergiste pouvait tenir un an de siège sans perdre une seule livre avec cette abondance de victuailles.
Elenya relava la tête, ses longs cheveux noirs tombaient jusqu’à ses épaules, sa mine soucieuse était d’autant plus marqué que d’épaisses cernes noires encadrées ses beaux yeux verts. Elle médita sur la situation encore une fois. Dans quel guêpier c’étaient ils encore fourrés. Elle poussa finalement un long soupir de frustration.
– De toute façon, il n’y a pas d’autres issues. Nous nous ne sommes peut être jeté dans la gueule du loup mais nous n’avions pas le choix. Espérons que notre étrange sauveteur ne se révèle pas être un traitre.
– Dois je vous rappelez Madame que nous avons très certainement affaire à un voleur sans foi ni loi ? Vous avez remarqué comme moi avec quelle habilité il s’est emparé de la bourse de Kyrian, le plus alerte d’entre nous, celui à qui nous avons confié la bague…
– Cesse ces vouvoiement Felias, après ce qu’il s’est passé, nous pouvons nous permettre une certaine familiarité non ? dis Elenya avec un sourire aux lèvres. Quand à ce qu’il est du voleur, je vous l’ai déjà dis. Nous n’avions pas le choix.
Le vieil homme détourna les yeux de son bâton qu’il regardait depuis leurs entré dans la grotte et il ne put s’empêcher de sourire à celle dont il avait donné son allégeance.
– Vos désires sont des ordres, répondit il espiègle.
Si ce débat bon enfant avait fait sourire les deux protagonistes, Kyrian quand à lui fixait constamment le mur coulissant, ne baissant jamais sa garde. Sans quitter le passage des yeux, il s’adressa à ses compagnons.
– Vous croyiez que cela a été une mauvaise idée de passer par les montagnes du levant ?
– Kyrian, nous en avons déjà parlé. Répliqua Felias. Pour se rendre à Fort Dragon c’est le chemin le plus viable. Sinon il faudrait passer par Septinia, depuis dix ans aux mains de l’empereur, siège de la V° légion et gouverné par le frère même de Malkin. La tache serait considérable et si par miracle nous arrivions a passer, il faudrait encore se diriger vers Albian, la capital du royaume d’Arklan, et comme tout le monde le sait, véritable nid de brigands et d’espions à la solde de notre « cher » empereur. Non, le plus fiable reste encore de tenter de passer par les montagnes malgré les périls que cela entraine, ils sont bien moindre en comparaison.
– Nous savons très bien pourquoi il pose la question Felias, il est juste déçu de ne pas pouvoir gouter aux filles de joies d’Albian. Ironisa Elenya. Tout le monde sait que le grand et preux Kyrian a un faible pour ces plaisirs.
– Tu as une bien mauvaise image de moi, se défendit l’intéressé jouant d’être offusqué. Tu sais très bien que je suis le plus pieux chevalier de l’empire ! »
Felias et Elenya durent se retenir de rire, de peur de trahir leurs présence mais il ne purent contenir quelques hoquets et des larmes montèrent à leurs yeux.

Pendant ce temps, juste au dessus de la tête des trois fugitifs, Galiagne attendait les visiteurs. La Jument Couronnée était la seule auberge du hameau et si, comme il le craignait, ces hommes étaient à la recherche des trois voyageurs, ils allaient forcement passer fouiller l’auberge de fond en comble. Et si il voulait sauver ces inconnus et surtout remplir ses poches, il allait devoir jouer un rôle. Combien de fois déjà il avait du le faire pour sauver des proches ? Il se rappelait de l’époque où cela était spontané, sans vénalité, par amitié et même amour… Il se sentait idiot d’avoir était aussi naïf. De croire que des bonnes actions pouvaient aider. Mais là, il y avait autre chose qui l’attirait, une force qu’il ne comprenait pas le poussait à réagir. Il avait un rôle à joué dans un destin qu’il ne connaissait pas encore.
Avec un soupir, il alla passer un tablier comme celui de Theovin et commença à nettoyer la pièce. Les crépitements de l’âtre emplissaient la salle d’un doux bruit. Soudain la porte s’ouvrit et un courant d’air glacial entra, soufflant quelques bougies et ravivant les braises du foyer. Un grand homme entra dans la taverne suivit de trois soldats en uniformes rouges, couleurs de l’empire. L’homme s’avança, il ne portait pas d’uniforme mais de riches vêtements en laine pour se protéger du froid polaire des montagnes. Son regard perçant balaya la pièce et s’arrêta sur Galiagne, toujours occupé à feindre son rôle de second tavernier. Ses yeux d’acier le jugea et il se dirigea vers lui d’un pas assuré, son long manteau noir frottant contre le sol, laissant une trace sure le planché sale de l’auberge. Il cachait tout son corps et Galiagne n’arrivait pas à distingué si l’homme était armé. Quoi qu’il en soit, c’était une menace. Ces cheveux blond tombaient sur son front et il les remis négligemment avec une main gantée. Malgré ses traits juvénile, il dégageait un aura de confiance et d’autorité qui sont propres aux jeunes nobles de l’empire. Galiagne continuait négligemment de nettoyer une table, ignorant le nouveau venu. Celui-ci s’installa sur une des chaises vident de la table. Galiagne stoppa son chiffon et regarda, curieux, l’homme qui venait de s’installer. Les deux individus se jaugèrent du regard.
– Fichu temps n’est ce pas ? lança l’homme pour engager le dialogue. Encore une de ses campagne pourrie jusqu’à la trogne ou rien ne pousse, c’est pas à la capitale qu’on aurait un temps comme ça.
– Nous sommes en hivers Messire. Répondit cinglant Galiagne. Nous n’avons pas près de nous notre empereur bien aimé pour nous réchauffer le cœur.
– Du sarcasme ? Tu sais que l’on pourrait t’enfermer pour cela ?
– Non sir, j’exprimais juste mon profond respect pour notre empereur. Il gouverne avec justice notre peuple vous ne trouvez pas ?
– C’est vrai qu’il est plaisant de le voir rendre justice. Les pendaisons et torture publiques sont distrayantes. Ces gueux n’ont que ce qu’ils méritent. Dit il en s’installant plus confortablement dans son siège.
– Et que faite vous si loin de ces distractions ?
– Malheureusement je suis en mission, nous devons ramener devant l’empereur trois fugitifs qui se sont échappé du palais il y a une semaine. Une bonne récompense a été promise. Tout service rendu aux serviteurs de l’empire sera bien vu.
Pendant leur discussion, les trois soldats restés à l’écart se sont rapprochés et ont commencé à fouiller l’auberge. Ils entraient dans chaque chambres, les fouillant de fonds en combles. Ils ouvraient brutalement chaque port, défonçant presque à chaque fois le loquet.
Galiagne se douta que chaque habitant du bourg devait contempler la même scène et le paisible village devait être sans dessus dessous avec l’arrivée de ces miliciens. L’homme assis en face de lui termina tranquillement un bière, ignorant la fouille, se concentrant uniquement sur le fond de son verre.
Finalement, un des soldats se rapprocha et se mit en garde à vous devant lui.
– Il n’y a rien messire. Et je pense que nos compagnons ont fini leur fouille du village.
– Bien, je vois qu’il nous reste plus qu’à partir.
Il recula lentement sa chaise, se leva mais au lieu de sortir comme l’attendait Galiagne, il le regarda droit dans les yeux et ne quitta pas son regard. Il sortit de son col un médaillon en forme de croissant de lune et tout en continuant a le regarder, il se mit a murmurer à voix basse. Il fit balancer sont médaillon et les yeux de Galiagne devinrent soudainement vides, il sentit ses résistance s’affaiblir. L’homme continua à s’avancer vers lui et se mit à lui parler :
– Ton nom. Dit il d’une voix grave.
– Galiagne répondit se dernier, le regard perdu dans les yeux de l’inquisiteur.
– As-tu vu, Galiagne, inconnus entrer ici, tard dans la nuit ? les aurais tu caché ?
– Je…
L’homme était suspendu aux lèvres du jeune homme, il ne remarqua donc pas que ce dernier, les mains profondément enfoncé dans ces poches, s’entailler la peau avec son canif.
– Non, finit il par répondre. Aucun inconnu n’est rentré dans cette auberge.
Le sorcier soupira, rompant ainsi le sortilège.
– Venez, nous partons, nous n’avons plus rien à faire dans cette campagne bouseuse. Ils ont du passer par Septinia. De toute façon l’entré du col est bien gardé et leurs portraits sont connus de toute la garde. Nous les rattraperons.
Sans même prendre le temps de se retourner, il franchit la porte en trombe, suivit de ses soldats, claquant la porte derrière eux.
Si l’arrivée des troupes impériales s’est fait dans la plus grandes discrétions, leur départ en fut l’exact opposé. Les soldats rassemblés sur la grande place piaffaient d’impatience et le bruit de leurs bottes claquants sur les pavés au rythme de la marche militaire teint en éveille les pauvres paysans encore sous le choc. Galiagne se détendit enfin. Les efforts qu’il avait fournis pour résister à l’inquisiteur de l’empire étaient colossaux et les entailles qu’il s’était faites ne voulaient pas arrêter de saigner. Il prit un linge sur le comptoir et commença à essuyer ses plaies. Si un inquisiteur était à la recherche des trois fugitifs alors c’est qu’il y avait anguille sous roches et qu’il y a surement une montagne d’argent à se faire sur cette affaire. Mais pour l’heure, il devait se reposer.
Theovin qui s’était fait tout petit durant toute la durée de la fouille, allait faire sortir ses trois invités de leurs cachette. Il allait tirer sur le mécanisme quand Galiagne le stoppa :
– Ne fais pas ça. Laisse les dans la cave, l’empire nous tends peut être un piège, attendons au moins jusqu’à demain avant d’ouvrit le passage.
Il avait aussi une autre idée en tête qu’il gardait pour lui, demain aurait lieu un affrontement et il voulait mettre toute les chances de son côté.
Il alla donc éteindre les dernières bougies allumées de la pièce, donna un verre d’eau à Theovin en le réconfortant et fila se coucher.

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