Octobre 3012

Ils n’étaient pas nombreux, certes, mais juste assez pour créer un joyeux bazar sur leur passage. Le petit groupe d’une trentaine d’élèves se faisait remarquer par les badauds qui déambulaient paisiblement dans les rues de la capitale. Ils arpentaient les grands trottoirs de l’avenue principale et se dirigeaient vers la grande bibliothèque d’un pas enjoué. La bibliothèque nationale d’Andromedia, fierté de la Nation Unique, dernier endroit du pays dans lequel on pouvait trouver une quantité astronomique d’ouvrages en papiers.

L’après-midi se terminait et la joie des jeunes, qui allaient travailler pendant encore trois bonnes heures, était très mal contenue. Pour ne rien arranger, c’était vendredi et les relents d’un week-end approchant se faisaient déjà sentir. Ces mines déçues, énervées et surexcitées qui remontaient l’artère principale de la ville, se frayaient un passage entre les passants qui se promenaient tranquillement.

Ces jeunes gens, encore fougueux et pleins de cette vigueur joviale attribuée aux jeunes adultes qui ne rêvent que de soirées arrosées et d’amitiés naissantes, étaient menés d’une main de maitre par un petit bonhomme trapu et chauve. Le professeur qui les conduisait dans l’antre de la connaissance avait tout intérêt à tenir ses troupes en laisse. Lui ne pipait mot mais les jeunes derrière étaient plutôt bavards. Certains même chantaient à tue tête des airs de camps de vacance. Ces étudiants, qui avaient tous dépassé la vingtaine, ressemblaient plus à une classe de primaire allant visiter le zoo du coin plutôt qu’à un groupe d’universitaires sérieux et travailleurs.

— Fin de la recrée ! hurla le professeur en se retournant brusquement vers ses élèves.

Le groupe stoppa net.

— Vous avez quel âge ? dit-il en braquant un doigt rageur vers eux.

Et là, le silence se fit, et tout le monde fut surpris qu’un si petit personnage puisse élever la voix aussi haut. Bien sûr à s’égosiller comme ça il avait finit son petit sermon rouge comme une tomate. Mais plus personne ne mouftait. Puis il eut le malheur d’ajouter qu’il aurait mieux fait de démissionner.

S’en suivirent un tonnerre d’applaudissements et des hourras encourageant le professeur à cette finalité. Mais ce dernier ne répondit rien. Puisqu’il n’y avait rien à dire. Il s’était habitué à ne plus avoir le fin mot de l’histoire. Ces jeunes cerveaux débordants d’idées farfelues et de répliques sanguinolentes s’en donnaient à cœur joie lorsqu’il s’agissait d’amuser la galerie. D’un air las il se retourna en jaugeant le reste de chemin qu’il lui restait à parcourir avant d’atteindre sa destination. Le groupe se remit en marche, les bavardages reprirent, et l’un d’eux entonna un autre air.

Finalement arriva l’imposante bâtisse. Une immense tour de béton qui se dressait abruptement devant eux. La bibliothèque nationale, celle qui allait les retenir pendant ces trois dernières heures de supplice. Rien que les marches qui y menaient paraissaient insurmontables. Mais ils n’avaient pas le choix. Et le groupe se mit en branle, d’un pas peu enjoué, à contre cœur, une marche rythmée par les murmures et les soupirs. Le professeur, qui avait déjà commencé l’ascension, ressentait cette satisfaction joyeuse envahir son for intérieur.

Comme à l’accoutumée, trois jeunes étaient à la traîne. Toujours les trois mêmes. Trois qui discutaient encore en riant de la réplique qu’avait balancé Cup au professeur deux minutes auparavant.

— T’as vu la tête qu’il a faite, tordant ! s’exclama Cup à l’intention de Jylian qui répondit avec un sourire.

— Vous devriez avoir honte, vous êtes la risée de la classe, lança la jeune femme qui était avec eux.

— Pour être plus exact, c’est Cup qui a prit cette initiative stupide. Moi je n’ai souri que parce que les circonstances s’y prêtaient. Je ne cautionne pas son acte. Mais je dois avouer que la réplique était mordante, ajouta Jylian en tapotant l’épaule de Cup.

— Ouais, ouais, c’est ça tu te marres mais t’es pas d’accord. Pour moi c’est une contradiction mon petit Jylian, parce que quand je te vois sourire à mes idioties, comme tu dis, ça veut dire que t’es sur la même longueur d’onde que moi. Tu me suis ? répliqua Cup.

— Non, ça c’est ce que tu en déduis triple buse, c’est rare que l’on soit sur la même longueur d’onde. Tiens, en y repensant, et pour imager la chose, hier je regardais une émission politique, tu as déjà regardé des débats politiques ? Non ne réponds pas, cette question est stupide, bien sûr que non. Enfin, hier, lorsque les deux opposants étaient face à face, l’un des deux a sorti une blague de mauvais goût sur le camp adverse, ce qui n’a pas eu l’effet escompté, ça l’a discrédité aux yeux de ses partisans. Enfin pour dire que l’autre, son adversaire, s’est mis à sourire, d’une part parce que la blague était mauvaise et d’autre part parce qu’il savait que son détracteur venait de perdre cette bataille politique. Tu comprends ce que je viens de te dire ?

— Ne me prends pas pour un neuneu. Il a souri mais il n’était pas du même avis, répondit Cup.

— Quel esprit vif nous avons là ! dit Jylian en se tournant vers Cassia.

— Oui, enfin tout ça pour dire que si le prof découvre l’idiot qui l’a vanné, moi je n’ai rien vu, rien entendu, ajouta Cassia en imitant Jylian qui accélérait le mouvement pour rattraper le groupe devant eux.

— Oui mais ça vous a quand même bien fait rire, murmura Cup, seul en bas des marches et voyant ses deux amis lui tourner le dos et s’éloigner.

Les trois étudiants se nommaient Cassia, Jylian et Cup. Respectivement vingt-deux, vingt-trois et vingt-cinq ans. En notant que Jylian et Cassia avaient des parcours d’étudiants exemplaires contrairement à Cup qui s’était largement familiarisé avec le redoublement, jusqu’à ce que ce dernier en devienne banal.

Cassia était une petite brune aux yeux noirs avec un air de gamine débrouillarde et toujours souriante. Elle vivait avec ses parents dans un immeuble près du centre-ville. Les fins de mois étaient difficiles et de ce fait, elle avait compris l’importance des études pour acquérir un emploi stable et décent. Comme pour beaucoup d’autres personnes, sa vie était faite d’une routine ennuyante. Sauf exception faite lorsqu’elle était avec ses deux amis. Surtout avec Cup. Elle ne savait jamais à quoi s’attendre de sa part. Ni elle ni personne d’autre d’ailleurs.

C’était tout Cup. Si un seul mot devait le définir, c’était indéfinissable. Parce que vous perdriez votre temps à classer un inclassable, à tenter de ranger quelqu’un qui ne voulait pas être rangé ou à le qualifier de mots qu’il ne comprendrait certainement pas. C’était un rebelle à ses heures, c’est-à-dire quand cela l’arrangeait. Un opportuniste au grand cœur, moi d’abord mais alors tout le monde ensemble. Le seul homme qui avait autant de lâcheté que de courage. Le roi des couards de son genre. Mais s’il fallait défendre ce en quoi il croyait, il était impossible de trouver meilleur exemple de ténacité.

Il était aussi grand que Jylian. Et la comparaison s’arrêtait là. Cup avait de grands yeux marron-verts, un air de dernier de la classe avec ses cheveux jamais peignés et ses yeux qui vous lançaient des « Je pige absolument que dalle à ce que tu m’dis l’ami » à tout bout de champ. Les regards glissaient sur lui, on ne le remarquait pas avec son physique banal. Ce qui l’arrangeait et l’énervait au plus haut point.

Jylian était le parfait contraire de Cup. Il habitait dans la banlieue aisée, son père était un grand chef d’entreprise. Les études étaient là pour occuper sa jeunesse dorée, puisqu’il avait la certitude que dans un futur maintenant proche, il se verrait attribuer le poste que son paternel occupait encore. Donc au final, tant qu’à faire quelque chose, autant faire quelque chose qui plaise. C’est alors que Jylian s’est retrouvé à la faculté d’Histoire de la capitale. Il était plutôt grand, des cheveux bruns toujours biens coiffés. Il plaisait aux filles et il le savait. C’était en grande partie à cause de ses beaux yeux bleus. Il venait d’un milieu aisé et ne le cachait pas. Au premier coup d’œil, il avait cet air faussement supérieur qui était dû à une relative timidité. En réalité, c’était un jeune homme assez distant et plus souvent observateur que participant. Il restait en retrait aussi longtemps que possible et ne disait pas grand chose. Mais lorsqu’il parlait, alors chacun de ses mots étaient choisis, s’accordant avec son timbre de voix posé et jouant avec un vocabulaire recherché qu’il se plaisait à utiliser à de maintes reprises. Ce qui ne manquait pas d’en faire enrager certains au plus haut point, et un plus particulièrement qui s’énervait d’être ainsi rabaissé de la sorte. Mais il se surprenait, bien malgré lui, à délaisser ses belles paroles pour un langage plus commun, certainement à cause de l’influence de Cup. Et inversement, il pouvait lui aussi se vanter d’enrichir le vocabulaire plutôt limité de ce dernier.

Ces trois-là ne se ressemblaient pas, mais ils se complétaient. Deux ans qu’ils se connaissaient et deux ans qu’ils étaient inséparables. Comme les trois doigts de la main braillait Cup complètement bourré dans un sursaut d’intelligence.

Ils enjambèrent les marches, trois par trois jusqu’à enfin rejoindre leur promotion devant la grande porte en bois.

Les deux lourds battants de la porte s’écartèrent lentement dans un crissement à vous en briser les tympans.

— Tout est dans l’accueil. Il faut en mettre plein la vue, chuchota Cup.

Il continua sur la même lancée et se mit à expliquer comment, selon lui, l’accueil ou les premières impressions que donnent un endroit, permettent de savoir si la soirée en perspective sera amusante ou ennuyante.

Le silence s’était emparé de l’ensemble du groupe d’étudiants. Le professeur regardait fixement les trois du fond depuis au moins une minute, ce qui aurait dû les faire taire. Encore fallait-il qu’ils s’en aperçoivent. Ils étaient en train de conclure que, d’après les dires de Cup, la soirée allait passer lentement, très lentement. Et quand enfin ils tournèrent la tête pour remarquer que tout le monde les dévisageait, il y eut comme un malaise

Cassia se sentit rougir. Tandis que Jylian et Cup riaient dans leur barbe en regardant leurs pieds. Le prof continuait comme si de rien n’était. Il prit un ton hautain et dégagé de toute humanité, et c’est comme s’il ne s’adressait à personne qu’il se mit à discourir sur l’histoire de la bibliothèque. Mais sa litanie fut vite interrompue par une prise de parole inopportune.

La pièce dans laquelle ils se trouvaient semblait servir d’entrée, il n’y avait qu’un grand bureau surélevé en bois. Une réceptionniste était installée derrière ce dernier. La petite lampe qui y était posée éclairait juste ce qu’il fallait, c’est-à-dire pas grand-chose. La décoration, si l’on put dire qu’il y eut un effort dans ce sens là, était sobre. Les murs étaient hauts, en pierre, peut-être du marbre. On ne pouvait en être certain car les imitations étaient parfaites, mais la splendeur du bâtiment et sa réputation toujours intactes malgré le temps écoulé, laissaient penser que tout était d’époque dans ce bâtiment. Cette entrée semblait classique, ancienne. Il fallait avouer que l’on se sentait presque comme dans un musée. Le design de l’époque n’avait vraiment plus grand-chose en commun avec le style qui était représentait dans cette large bâtisse. Derrière le bureau se trouvait encore une porte, d’une taille raisonnable, comparée à celle que nous venions de passer.

Celle qui avait interrompu le professeur se présenta. Elle répondait au doux et gracieux nom de madame Fouinsec. Et Cup, tout sourire, prêt à se faire plaisir, allait lâcher une blague. Mais Cassia avait assez eu la honte pour la journée et laissa malencontreusement son coude cogner contre ses côtes. Ainsi cette chère madame Fouinsec put continuer tranquillement son petit discours de quinze minutes, reprenant exactement les mêmes recommandations que monsieur Peravy, le professeur, leur avait donné. Puis elle les conduisit vers la porte d’entrée de la bibliothèque. Juste avant de l’ouvrir, elle s’arrêta net et donna un dernier conseil et non pas des moindres :

— Sachez que la hauteur de notre bibliothèque est telle que le moindre petit bruit résonne entre les murs, provoquant un raffut de tous les diables. Merci de vous tenir correctement et de ne faire donc aucun bruit, siffla-t-elle en montrant du doigt un panonceau arborant la phrase aucun bruit n’est toléré sous peine d’expulsion.

Cup sourit une deuxième fois rien qu’à l’idée d’un duo de gardes au faciès de madame Fouinsec et au corps de militaires musclés en train d’expulser un pauvre lecteur qui aurait eu la malchance de faire tomber sa règle métallique sur le sol.

En prononçant cette dernière phrase, le regard de la bibliothécaire s’était longuement attardé sur la tête de Cup qui jubilait d’avance, rien qu’à l’idée d’entrer dans une énorme trompette. Mais c’est silencieusement et tranquillement que les étudiants pénétrèrent dans la salle tant redoutée.

Puis vint l’étonnement car la seule et unique pièce de la bâtisse était immense, des murs gris et en béton. Il y flottait une odeur de vieux qui trainait dans l’air, une pénombre grisonnante qui enveloppait chaque recoin de la grande salle et des fines particules de poussières qui virevoltaient dans les quelques halos de lumière. Une grande tour cylindrique percée de petites et longues fenêtres telles les meurtrières d’un château fort. L’ambiance était lourde, silencieuse et studieuse.

Les étages s’enroulaient dans les murs de cette bâtisse qui ressemblait plus à un énorme conduit de cheminée qu’à une bibliothèque. On pouvait accéder à ces étages grâce à deux escaliers situés sur les côtés. Mais droit devant eux, dans ce que l’on aurait pu appeler le conduit de la tour, s’étendaient d’immenses étagères, grimpant dans toute la hauteur de l’immense boyau, où étaient rangés des livres de toutes sortes. Ces livres étaient bien sûr inaccessibles, mais c’était sans compter sur un système mécanique commandé d’en bas qui allait chercher le livre désiré sur n’importe qu’elle étagère de la bibliothèque. Quelques auras de lumière se formaient de-ci de-là, sur les tables où étaient disposées des lampes, ces lampes qui semblaient provenir d’une autre ère. Il n’y avait pas plus de deux personnes par table, chacun s’éparpillait loin de son voisin à la recherche d’une tranquillité et d’un calme pourtant déjà présents.

Effectivement, chaque bruit que l’on faisait, aussi minime fut-il, provoquait un écho qui se répercutait entre les murs froids de la tour. Les trente élèves commencèrent à chuchoter. Le bruit enfla petit à petit jusqu’à devenir un résonnement bruyant qui remplaça rapidement le silence. Ce fut comme si toute la faculté s’était déplacée. C’est alors que ce très cher et très apprécié monsieur Peravy lâcha un la ferme absolument bruyant qui stoppa net les jeunes. Sans compter l’écho qui se fit entendre encore une bonne minute après son cri. Ce fut sur un fond de « la ferme… la ferme… la ferme… la ferme… la ferme… » que madame Fouinsec les informa du fonctionnement de la bibliothèque. Elle leur désigna le troisième étage en levant haut le doigt à sa gauche. Chaque étage donnait sur le conduit principal du bâtiment, tel un empilement de mezzanines avec vue sur le vide. Ce même étage qui allait leur servir pour leurs travaux sur un évènement important du passé. Sans s’être départis de leur joie et gaieté de cœur, nous empruntâmes les escaliers de droite, le bruit de leurs pas atténué par la moquette qui recouvrait le sol. Une moquette assez épaisse et d’une couleur vert sombre. D’un esthétisme certes limité mais d’une très grande utilité. Nombreux avaient été les pas qui l’avaient foulé, sa couleur terne et passée pouvait en témoigner.

— Il ne faut pas avoir le vertige ! marmonna Jylian.

— La ferme… la ferme… la ferme ! chuchota Cup en imitant l’écho qui avait déjà cessé depuis quelques minutes.

— Y’a Couinsec qui te fait les yeux doux Cup ! fit remarquer Cassia.

Arrivés au troisième étage, ils virent les différentes rangées de livres s’étaler devant leurs yeux. Les étagères disposées de cette façon formaient de petits espaces confinés. Contrairement à ce que l’on voyait d’en bas, les étages étaient bien plus grands, et s’étendaient dans l’épaisseur des murs de la tour.

En plus d’être long, ça allait être pénible. Le professeur nous donna les sujets et chacun se mit à chercher les références des livres dans chacune des rangés. Puis chaque groupe nouvellement formé avait trouvé son livre, compris quelle était la problématique et s’était installé à une table pour discuter de la pluie et du beau temps. Tous nous étions éparpillés çà et là, sur tout l’étage, chaque groupe formé selon les affinités et installé chacun dans un coin, cachés les uns des autres par des étagères de livres. Tous parlaient tout bas. On pouvait déjà faire une première distinction, ceux qui travaillaient et ceux qui attendaient que le temps passe. Et ils étaient plus nombreux à s’être rangés dans la deuxième catégorie.

Moi, Cup et Jylian avions le plaisir de travailler sur la formation de l’Assemblée Nationale. La longue soirée de réjouissance commençait à peine.

— Ca fait deux cent cinquante huit ans cette année que l’Assemblée est en place, elle détient les pouvoirs législatifs et exécutifs, elle est composée de cinq cent membres, deux représentants de chaque région de la Nation Unique. Que dire de plus ?

Je pensais à haute voix, regardant le livre que je tenais entre les doigts, tandis que Jylian faisait un plan succinct avec ce que je venais de dire.

— Peut-être devrions-nous nous intéresser au fonctionnement de l’assemblée ? supposa Cup.

— On fait de l’histoire. Je pense que ce serait plutôt aux évolutions qu’elle a subi à travers le temps, rectifia Jylian sans même le regarder.

— Dans ce cas la question serait : en quoi l’Assemblée Nationale a-t-elle évoluée de sa création jusqu’à nos jours ? renchéris-je.

— Bah oui, bien sûr, je le savais mais je voulais pas le dire. Comme ça on pourra travailler l’historique de l’assemblée. Bien vu Cassia.

Cup allait continuer sa pensée mais Jylian l’interrompit.

— On pourra inclure un paragraphe qui parlera de leurs relations avec l’armée, leurs décisions, les frictions entre le pouvoir militaire et l’Assemblée et comment ils dirigent le pays, etc.

— Oh ! Ouais l’armée ! Excellent ! Je m’occupe de cette partie. Description de son fonctionnement, comment exécute-t-elle les ordres et tout et tout ! Je m’en charge !

Il s’était soudainement frappé la poitrine de son bras droit, le poing resserré sur le cœur, il ne bougea plus et resta dans cette position un instant. Le salut de l’armée nous indiqua-t-il. Nous le savions, c’était évident, et cela nous arracha un sourire qu’il prit pour de la moquerie.

L’excitation de Cup pour ce sujet avait trahi son admiration pour le pouvoir militaire. Cup était simplement enchanté de travailler sur l’Armée. C’était limite s’il bavait sur mes feuilles. Ce devait bien être la première fois que je le voyais intéressé par un sujet donné en cours.

Cup ne paraissait pas être un surdoué. Il n’en était pas un. Et rare étaient les cours qui l’intéressaient. Mais il n’était pas bête, loin de là. C’était pourtant ce qu’il s’acharnait à faire croire aux plus ingénus, sachant que cela lui servait surtout à amuser la galerie. Mais en réalité il était doué, s’il s’en donnait la peine.

Ce qu’il aimait par-dessus tout c’était la mécanique et le pilotage. Et là, c’était un surdoué, un pilote d’exception. Je le savais parce qu’il m’avait avoué avoir fait plusieurs tentatives pour rentrer à l’école de formation des pilotes, une branche de l’armée. Il avait été accepté. Mais pour une brève période seulement.

Le problème avec Cup, c’était l’autorité. Trois mois, c’est le temps qu’a duré son stage, vous dira-t-il. En réalité c’est le temps qu’ils ont mit avant de se rendre compte qu’ils ne feraient pas de lui ce que bon leur semblait. Alors Cup a été recalé lors des deuxièmes sélections. Ce qui ne l’a pourtant pas empêché d’essayer encore et encore de repasser les examens d’entrée. Mais en bon paranoïaque, il était certain d’avoir un dossier là-bas et de ne plus jamais avoir l’opportunité de remettre les pieds dans un appareil de l’armée. Pourtant Cup avait toutes les aptitudes requises pour être un excellent pilote. Seulement il n’en possédait pas les qualités.

Mais comment savais-je qu’il était un excellent pilote ?

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