J’attendis une grosse demie heure avant de sortir. Puis j’enfilais ma veste en cuir, mes talons et quittais l’appartement. Comme nous étions vendredi soir, mon frère ne risquait pas de rentrer de suite. J’avais deux bonnes heures devant moi pour faire ma petite sortie nocturne. J’étais devenue comme accro à la nuit, comme d’autres le sont des vampires.

Je dévalais les marches des trois étages, accompagnée à la fin par les aboiements intempestifs de Jerry, l’épagneul Breton de la concierge. Je trouvais ce nom vraiment ridicule pour un chien, mais je n’aurai jamais la folie de l’avouer à Mme Belou.
Je promenais mes doigts sur le battant en bois de l’appartement de cette dernière.
Chuuuut… murmurais-je à la porte.
Aussitôt, Jerry se tut. Satisfaite, je sortis de l’immeuble après avoir vérifié que j’avais bien pris toutes les clefs.
Et je me pris l’averse.
La pensée que Jerry avait voulu me prévenir me fit sourire avant que je ne coure telle une possédée jusqu’au bar de Drei.
Je n’avais pas remarqué le temps lorsque je regardais par la fenêtre, sinon, j’aurai pris une autre veste. Mais je n’avais plus la motivation de faire demi tour.
Je m’arrêtais quelques secondes sous des porches, sous des toits ou autres abris précaires pour éviter de trop tremper ma veste. Ce qui fut bien inutile, je l’avoue.
J’étais trempée lorsque j’arrivais devant Chopes Agogo, mais le pire, ce fut de constater que ce n’était même pas ouvert.
Et merde ! Grognais-je entre mes dents serrées en m’adossant un maximum à la porte du bar pour éviter le déluge.
J’observais les nuages gris, amoncelés au-dessus de la ville comme pour la noyer de leur noirceur.
Soudain, plus rien ne soutint mon corps qui bascula en arrière. Ne m’y attendant pas, je battais vaguement des bras et trébuchais. Mais au lieu de finir sur les fesses, je terminais ma chute dans les bras d’un homme sacrément costaud.
Je renversait la tête en arrière pour voir mon sauveur, et Drei me sourit, dévoilant de belles dents bien blanches, bien alignées et… peut-être un peu plus pointues que la moyenne. A moins que ce ne fut mon imagination qui ne me joua des tours.
Je lui offrais mon plus beau sourire aguicheur, histoire de passer pour plus détendue que je ne l’étais en réalité.
Hello Drei ! Comment allez-vous ? Demandai-je poliment en sachant pertinemment qu’il ne me répondrait pas. J’ai cru que votre bar était fermé, avouais-je, penaude.
Vous êtes trempée, Vae.
Je clignais des yeux bêtement telle une chouette hulotte, surprise d’entendre sa voix pour la première fois. Et je réalisais après la guerre que jusqu’à présent, il ne m’avait jamais sourit non plus.
Il me redressa d’une main et ferma la porte. Moi, je restais droit comme un piquet en suivant le moindre de ses mouvements, suspectant un coup foireux. Il était peut-être tombé sur la tête…
Je vais vous chercher une serviette, me lança-t-il en passant derrière le comptoir, me laissant seule.
Je ne le quittais des yeux que lorsqu’il disparut dans les escaliers qui, je le savais, menaient au premier étage. J’entrepris alors seulement de retirer ma veste et la déposait délicatement sur le dossier d’une chaise. Elle ne sécherait pas totalement, mais au moins serait-elle moins dégoulinante quand je rentrerais chez moi.
J’allais ensuite m’installer sur le comptoir, et fixais la porte par laquelle Drei s’était éclipsé. Finalement, le bar était bel et bien fermé, étant donné l’absence visible de clientèle. Alors pourquoi diable m’avoir faite entrer ?
Quelle mouche a bien pu le piquer, pensais-je distraitement en tapotant l’un des robinets pour servir les pressions.
Je n’entendis pas la porte d’entrée s’ouvrir, seulement le claquement d’une affiche soulevée par le vent. Je sursautais et relevais la tête. Si c’était un Gardien, j’étais cuite au sens propre du terme.
Mais je compris au premier regard que ce n’était pas le cas. Il était grand et imposant, certes, mais la chaleur qui brillait dans ses yeux n’était pas présente dans ceux des Gardiens. J’avais eu l’occasion d’en croiser plus d’un, et je ne l’oublierai pas de si tôt.
Euh… Dr… le barman est parti, bégayais-je en détournant le regard alors qu’il approchait à grand pas de moi.
Je pouvais sentir qu’il n’était pas humain, et quelque chose chez lui de surnaturel me mettait foutrement mal à l’aise.
Ah oui ? Drei est absent ?
O… oui. Non. C’est à dire que… qu’il est juste derrière.
L’inconnu sourit en regardant dans mon dos. Par réflexe je suivis son regard, mais il n’y avait personne.
Quand je reportais mon attention sur lui, il se trouvait si proche de moi que j’en eu un mouvement de recul instinctif. Il tendit une main et je reculais un peu plus sur le comptoir, dans la limite du possible.
Qu’est-ce que vous…
Il m’interrompit en me faisant un sourire si intimidant, tellement emplit de sous-entendus séducteur que j’en rougis.
Moi, rougir ! La grande dur à cuir qui ne craint rien ni personne ? C’était vraiment pitoyable.
Il s’approcha davantage, et je levais les mains comme pour imposer un rempart imaginaire.
S’il vous plaît, si vous pouviez garder vos distances… je ne vous…
La seconde suivante, son visage se retrouva à un souffle du mien, à tel point que si l’envie me prenait de l’embrasser, je n’avais qu’à tendre les lèvres.
Et l’envie me prenait. Bordel de merde.
Bien entendu, j’étais bien trop éduquée pour emballer de parfaits inconnus à cause de choses aussi traître que les hormones. J’inspirais donc profondément à la place pour calmer mes ardeurs.
Ce fut une grossière erreur. La tête me tourna subitement, et je vrillais naturellement mon regard dans celui de l’étranger. Il sentait un mélange de fougère, de fourrure et de pomme de pins, avec une once de transpiration, si tenue qu’elle lui donnait un côté viril foutrement excitant.
Ma seconde erreur fut de le regarder dans les yeux. Je me sentis comme aspirée, irrésistiblement attirée par son regard sauvage couleur savane, tels ceux qu’arborent les fauves, les prédateurs.
Et c’est là que je fus persuadée qu’il était un E.S, certainement même un Garou.
J’ouvris la bouche comme un poisson hors de l’eau. Je ne parvenais plus à bouger, à peine à respirer. Allez savoir pourquoi, je n’en éprouvais même pas l’envie, alors qu’un instinct primaire vieux de plusieurs millénaires me hurlait de fuir. Situation paradoxale, diriez-vous.
Il darda sa langue entre ses lèvres, se pencha un peu plus vers moi, prêt à frôler ma bouche de la sienne.
Aiden, éloignes-toi d’elle sur-le-champ, gronda la voix de Drei dans mon dos, menaçante.
Je tiquais, tentais de pivoter vers lui mais n’y parvins pas.
Le dénommé Aiden s’écarta un chouïa de moi, pas suffisamment à mon goût, mais je considérais cela comme un début ; je respirais déjà un peu mieux.
Aiden ! Dégage de là !
Visiblement, Drei n’était pas de cet avis.
Aiden recula enfin de plusieurs pas, un sourire aux lèvres, mais il ne me quittait pas des yeux. Je commençais sincèrement à m’inquiéter ; je me sentais comme une proie coincée par son prédateur le plus redoutable.
Une souris. J’étais simplement et purement une souris. Face à un tigre du Bengale.

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Bon, finalement vous avez bien vu que j’ai ajouté le chapitre 2 … PArce que le chapitre 1 en lui même ne suffit pas à se faire une idée sur l’histoire, je l’ai compris après coup x)

J’espère que vous avez passé un bon moment de lecture ; que ça soit le cas ou non, laissez un commentaire !

En tout cas, le chapitre 2 ne sera posté que si je vois que les gens sont intéressés 🙂 sinon ce n’est pas la peine que je rende mes histoires publiques s’il n’y a qu’à moi que ça plaît.

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